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PASTRE FranÁois
    Arbre d'ascendance     Arbre de descendance     Chronogramme
    PËre : PASTRE Etienne (1710 - 1751) (Age ý la naissance de l'enfant : 32 ans)
    MËre : VILLEDIEU Magdeleine
    Freres/Soeurs :
       PASTRE Antoine (1741 - 1741 )
       PASTRE Marie (?)
    Naissance :
          Date : autour de 1742
    DÈcËs :
          Date : 24 avril 1814 (72 ans)
          Lieu : ArdËche France - St Germain
    Note :
Le rassembleur de terres:
Le 23 fÈvrier 1768, FranÁois le cadet devient le maÓtre des Chazes: son aÓnÈ Antoine, nÈ le 18 janvier 1741, Ètait mort au mois de mars de la mÍme annÈe, «d'une angine» a notÈ le curÈ en marge du registre. Sa mËre ne lui a laissÈ la direction de la maison qu'ý l'’ge de 26 ans, l'annÈe de son mariage. Sa sceur Marie avait ÈpousÈ FranÁois Chazes dit SÈnËque de Saint-Germain le 16 fÈvrier 1763, Magdelaine s'empresse de remettre ý son gendre les «deux cents livres» de droit de logitime de Marie, l'argent de Claude Pouzache n'Ètait pas perdu pour tout le monde !
MaÓtre Dupuy sanctionne dans le contrat de mariage l'ascension des PastrÈ, en dÈcernant ý FranÁois, le qualificatif de «mÈnager». Il Èpouse Elisabeth Joffre de VoguÈ: Beau mariage et marice bien dotÈe. Le 3 fÈvrier 1768, la fiancce «s'est constituÈe en dot envers son fiancÈ tous les Biens et droits qui lui sont Èchus». Dot qui s'ÈlËve ý «deux mille livres ý elle lÈguÈes par ses pËres et mËres», ý laquelle s'ajoute un logat de deux cents livres par sa tante «demoyselle Marguerite Decelis». La rondeur de la dot est ý la mesure de l'importance et de la rÈputation des PastrÈ. Sur cette dot, ouze cents livres sont «retirÈes et emboursÈes» par FranÁois; les neuf cents livres restantes seront payÈes «en quatre paiements Ègaux, annuels et consÈcutifs ý commencer de ce jourdhuy». Sa belle-mËre Magdelaine Villedieu n'est pas en reste elle mettra dans la corbeille des jeunes mariÈs, un beau bouquet soit la moitiÈ de tous ses biens et remet l'entier hÈritage «dadit feu PastrÈ son mary». Rassurons-nous, la mËre ne se dÈpouille pas pour ses enfants elle se rÈserve l'habitation pendant toute sa vie «d'une chambre... d'un lit garni en cas de besoin». Elisabeth, la promise et la future belle-mËre ne signeront pas, par contre FranÁois s'exÈcutera imitÈ par les tÈmoins. Il lui en coñtera 27 livres 6 sols.
L'aisance qui s'installe dans l'espace national ý partir de la derniËre moitiÈ du 18e siËcle, rËgne aussi aux Chazes. Au mois de mars 1763, ses affaires enfin rÈglÈes, Magdelaine peut constituer de sa belle-seur Jeanne mariÈe ý Jean Fargier de Saint Jean le Centenier, une rente de 1500 livres dont elle avait acquittÈ «sept cent cinquante quatre livres» laissant le soin ý son fils FranÁois «d'en faire lentier paiement» ý son cousin FranÁois Fargier en date du 17 juillet 1769. Outre la constitution de rente de sa tante, Magdelaine logue ý son fils, les tracasseries de Claude Pouzache qui reviendra ý la charge en 1776.
FranÁois sous la houlette de sa mËre avait dÈjý pris en main le domaine, c'est lui qui le 9 octobre 1766 fait reconnaissance fÈodale en faveur de Dame «ThÈrËze» d'Ozil de Saint-Vincent, Comtesse douairiËre d'Antraigues. Il reconnaÓt «tenir et possÈder» les terres ÈnumÈrÈes dans la reconnaissance en emphytÈose perpÈtuelle avec droits de «lozs». Ce sont pas moins de 14 piËces de terres qui y sont ÈnumÈrces avec la kyrielle de leurs prÈcÈdents propriÈtaires. Et ce, jusqu'en 1488, en passant par les reconnaissances fÈodales successives avec le rappel inÈvitable du «sous la censive acoutumÈe». Les dites censives sont rÈputÈes «payables et portables» annuellement ý chaque «jour et fÍte de la Saint-Michel» dans la maison ou plutÙt l'hÙtel qu'occupe la Comtesse ý Villeneuve de Berg, la rÈsidence de Barjac.
La rÈaction nobiliaire n'est pas un vain mot dans l'histoire et FranÁois sans savoir qu'elle sÈvissait dans tout l'espace national doit s'exÈcuter lors de la rÈmission de l'hÈritage paternel; il fera des reconnaissances fÈodales successives aux personnages «qui ont seigneuries» sur ses terres. Manifestement les PastrÈ avaient le sens des affaires, et FranÁois va illustrer ces qualitÈ de belle faÁon puisqu'il va Ítre ý la fois le rassembleur de terres, le receveur des «dixmes» du chapitre de Viviers pour Villeneuve de Berg et Saint-Germain, le fermier du Moulin d'Audigier appartenant au comte de VoguÈ, «leveur» de cocons en plus de la gestion de son domaine sans oublier la charge de consul de sa paroisse.
Voyons la premiËre facette de notre personnage. Son grand-pËre Antoine et sa mËre Magdelaine Villedieu avaient soigneusement opÈrÈ des remembrements et des Èchanges pour homogÈnÈiser la propriÈtÈ: il sera bon fils et bon petit-fils. Il traitera entre 1766 et 1787 pas moins de 33 affaires tant achats que ventes ou Èchanges que nous allons voir par le dÈtail.
Le premier achat du «septiËme octobre mil sept cens soixante neuf» FranÁois achËte ý FranÁois Simon des «Escayrades» de Saint-ThomÈ «deux piËces laborives» situÈes dans le mandement de VoguÈ, terres qui confrontent naturellement de «marin» celles de l'acquÈreur pour le prix de 159 livres que PastrÈ <<promet payer» au jour et fÍte de Saint-Simon (touchante attention pour le saint patron du vendeur: en fait, c'est le meilleur moyen de se rappeler de la date) et quand on sait que la Saint Simon est le 28 octobre, le dÈlai n'est pas trop long, nÈanmoins un reÁu datÈ de ce mÍme jour atteste que FranÁois a tenu sa promesse. Notons que ce Simon Ètait fermier du Marquis de Saint-ThomÈ et que ce mÍme jour o˜ FranÁois s'acquitte de la rente qu'il doit ý ce seigneur, n'est autre que le jour de la foire de Villeneuve de Berg ! Mais les documents de l'Èpoque n'ont pas fini de nous Ètonner, les 159 livres Ètaient pour un premier achat de deux piËces situces ý La Villedieu, dont il s'agit d'un premier paiement. Le malheureux Simon meurt entre-temps, mais le 21 septembre 1770, sa veuve Claudine du Poyet percevra les 159 livres du Champ Chabrier de VoguÈ (le premier billet Ètait en fait une promesse de vente).
Le 25 mars 1775, FranÁois acquiert de son cousin FranÁois Chazes dit SenËque du lieu des Chazes «une grange, cour et terre herme» prËs du hameau, avec les droits de passage, libertÈs et «facultÈs» inhÈrents ý la grange pour le prix de «cinq cent nonante neuf livres quinze sols»; cette vente rÈvËle qu'il s'agit en fait d'un Èchange puisque SÈnËque re,coit en contr partie une terre de valeur de 600 livres: la transaction se chiffrera donc ý 1 livre ! Il est vrai qu'entre cousins on s'entend pour Èviter les frais de notaire (rouÈs nos paysans !). Le 22 juillet 1776, FranÁois remet ý ce mÍme cousin, une donation de deux cents livres faite ý sa niËce lors de son mariage par son pËre Antoine. Il n'empÍche que les fermiers de Messieurs les Marquis «et comptes» de VoguÈ, Chabassol et Gimond recevront «soixante livres» (soit 10 %) de droits de lods et ventes, le 25 mars 1777.
Neuf ans plus tard, FranÁois continue d'amÈnager son domaine, il acquiert de Jean Roume de Saint-Germain «une piËce de terre laborive» situÈe au terroir de Bourdary, tout prËs du hameau des Chazes et bien sñr terre qui confronte «du levant et du marin» ledit PastrÈ ! Et ce pour la somme de «deux cent cinquante livres», cette terre est grevoe de tailles et rentes comme la quasi totalitÈ des terres roturiËres de la paroisse de Saint-Germain et du Bas-Vivarais.
«Le seziËme jour de fÈvrier» 1783, il Èchange avec Antoine Gascon de Saint-Germain «pour leur plus grande comoditÈ», une piËce de terre en vigne ý Roussac qui a pour contrepartie une piËce de terre et vigne situÈe au Pont «confrontant de marin», une fois de plus ledit PastrÈ. FranÁois reÁoit en complËment de valeur «cent vingt livres», ils signent tous les deux d'une plume mal assurÈe: «japrouve cedessus» PastrÈ-Gascon. Le 15 avril de la mÍme annÈe, FranÁois poursuit son «remembrement», il passe Èchange avec un autre mÈnager de SaintGermain, Charles Richard qui lui donne une piËce de terre «laborive» aux Bramefans (qui crient la faim, les bien nommÈs !). PastrÈ lui donne en «contre exchange» une terre ý la TraversiËre qui confronte une autre terre et devois de Richard. La terre cÈdÈe par Richard excËde en valeur celle de FranÁois de 60 livres, rÈglÈes sur l'heure.
A La Villedieu, le 15 aoñt 1784 (la fÍte n'est pas seulement l'occasion de rÈjouissances, processions, mais aussi celle d'affaires et pourquoi pas de projets de mariages), il y est procÈdÈ ý l'Èchange entre Antoine Vigne et FranÁois d'une piËce de terre «laborive et en partie herme» ý Champ Chabrier adjugÈe ý Vigne pour une valeur de 120 livres, FranÁois reÁoit en Èchange, une piËce de terre «herme et boissiËre» ý Tomple Arnaud «confrontant de bize (vous en doutiez ?) ledit PastrÈ, ÈvaluÈe elle ý 72 livres: la diffÈrence de 48 livres sera payÈe par Vigne comme il se doit ý la Toussaint.
FranÁois achetait certes mais il vendait aussi. Si la dÈcennie 17701783 fut une pÈriode d'achats et d'Èchanges, la suivante sera celle des ventes. Le 5 fÈvrier 1783, il vend au «Sieur FranÁois Fargier» lui aussi de Saint-Germain «des propriÈtÈs» soit une terre laborive, au terroir dit le LiËvre, terre petite, il est vrai puisque de contenance de «trois quarteronts» mais d'une valeur de pas moins de 700 livres. Soit une autre terre laborive au Bouchader contenant «sept boysseaux ou environt» pour deux cents livres. Soit «autre terre laborive de trois boisseaux» pour «septante livres», et finalement une autre terre laborive ý la Motte «d'une ceterÈe» celle-lý et pour 230 livres. Pas moins de 1200 livres qui passent sur 1'heure dans l'escarcelle de maÓtre FranÁois !
DÈcidemment, ce mois de fÈvrier fut fertile en ÈvËnements, ce mÍme 5 fÈvrier il vend ý Etienne Helly d'autres propriÈtÈs: premiËrement un «Claux» aux Combes de contenance «six ceterÈes, un quarteron environ» et ce pour 1200 livres: les claux Ètaient sans nul doute les terres du meilleur rapport; deuxiËmement une terre laborive ý la LauziËre, de contenance de six boisseaux «et demy» pour la somme de 250 livres. Et enfin autre terre laborive au «Rieu» pour 150 livres. Pas moins de 1600 livres qui changent de main. Helly est riche, il est un des gros mÈnagers de la paroisse, si le «j'aprouve ce dessus» de FranÁois est tracÈ d'une plume mal assurÈe, celui d'Estienne Helly rÈvËle non pas le lettrÈ mais une Èducation certaine.
La litanie des ventes continue, les prÈcÈdentes concernaient des terres de Saint-Germain, celle qui suit concerne La Villedieu. Le 5 novembre FranÁois vend «purement, irrÈvocablement et pour toujours» ý Lois Heyraud de Baissac une piËce de terre ý l'AumËde et ce pour la somme de 209 livres mais qui sera payÈe ý la fÍte de NoÎl. L'acte suivant nous ramËne ý Saint-Germain o˜ Jean Roume fait l'acquisition de deux «devois» le premier situÈ ý la Vachette de contenance «de six cheterÈes», le second au terroir de l'Espine, il lui en coñtera 1900 livres empochÈes illico par notre homme le 23 dÈcembre 1783 en attendant les-209 livres que versera le surlendemain Louis Heyraud.
En mars 1784, le 4 prÈcisÈment FranÁois remet ý AndrÈ Chazes dit SenËque (le surnom n'a pas encore chassÈ le patrouyme), deux piËces de terres, la premiËre situÈe aux Faysses de la contenance d'une «heymine et un boysseau», la seconde ý La Cham plus petite «deux quarterons» et le tout pour le prix de 144 livres. La plus petite vente du moment. Il est vrai que les deux terres en question jouxtaient «de bize, de couchant, de Marin» les terres d'AndrÈ Chazes. A tant que faire d'Ítre enclavÈ, vendons !
Au fur et ý mesure de ces ventes, FranÁois se voit pourvu de liquiditÈs. Quel but poursuit-il ? S'agit-il seulement d'opÈrer une rationalisation de ses terres ? Il achËte en juin 1784 le 7, sous la formule «vente privÈe» une piËce de terre laborive au terroir des faysses, riche quartier s'il en est, ý Charles Richard pour le prix et somme de «trois cents livres». Notons que «la rÈcolte pendente en blÈ froment» reste rÈservÈe pour l'annÈe au vendeur. Les achats et ventes rÈvËlent une accalmie de quatre annÈes. Il nten faut pas pour autant conclure que notre homme ait ÈtÈ distrait, ses multiples occupations l'accaparent. Le 11 septembre 1787, il «purifie» une obligation devant le notaire Duclos de Villeneuve de Berg. FranÁois verse la somme de 399 livres «dix neuf sols» pour reste et entier paiement de l'achat d'une piËce de terre, champ, «pred», «meuriers» et noyers, le tout situÈ au terroir de Jolivet. En effet le vendeur Simon Chazes avait passÈ vente de ces terres le 13 fÈvrier.1786 devant MaÓtre Espic notaire ý Aubenas, et ces 399 livres 19 sols consituent le reliquat de «deux mille neuf cent quatre vingt dix neufs livres dix neufs sols». Belles terres sans aucun doute convoitÈes par notre homme qui n'avait pas hÈsitÈ ý se dÈssaisir de tous les lopins prÈcÈdents pour rÈunir les sommes nÈcessaires ý ce coñteux caprice ! Cet acte sera confirmÈ et approuvÈ par Etienne Chazes frËre de Simon qui devait possÈder en indivis les terres vendues. Fñt-il mis devant le fait accompli, ou une raison majeure lui a permis de faire une entorse ? En effet les frËres Chazes Ètaient pressÈs puisque sur les 2999 livres 19 sols, 1426 livres 19 sols ont ÈtÈ payÈes non pas aux frËres Chazes mais ý leur crÈancier Jean-Louis Dussaut «habitant au lieu d'Aunas», paroisse de Lussas.
Dans l'intervalle de ces Ècritures, quittance, vente ou obligation il reste du temps ý notre mÈnager pour les contestations et autres chicanes. Voyons plutÙt: le 10 avril 1785, AndrÈ Gimond, Jean Authelin, Etienne Leyris, Pierre Imbert, Jacques Boulle, et Etienne Charbonnier tous habitants de Sauveplantade font demander ý Jean Roume, FranÁois PastrÈ, Gabriel et FranÁois Chazes, Louis Labrot et ý Monsieur Serrin «des arrÈrages de la taille» sur un devois ý Couderlic dont ils jouissent depuis «un temps immÈmorial», retard de 29 ans y compris l'annÈe 1785. Et voici nos six compËres se transportant ý Sauveplantade pour y examiner le compoix de l'endroit. L'extrait que nous possÈdons sent la machination, en effet le compoix rÈvËle que les habitants des Chazes qui utilisaient le devois en indivisis s'Ètaient allËgrement dÈchargÈs de la taille sur les habitants de Sauveplantade. Il leur en coñtera chacun 66 livres 11 sols 7 deniers: Ils n'auront pas fait le voyage pour rien, nos matois !
Les tracasseries continuent: le ler janvier 1789 FranÁois PastrÈ, FranÁois Labrot, Jean Raoux et SenËque, les habituÈs, se trouvent en contestation ý propos d'une terre herme situÈe ý Marniat. Chacun croit avoir des droits sur cette mauvaise terre. Finalement, ils traitent ý l'amiable et conviennent de se partager la terre contestÈe. SenËque obtient 630 toises du cÙtÈ du midi pour la longueur et 24 toises et demie de large: Jean Raoux 730 toises au levant et 29 toises au couchant: FranÁois PastrÈ 650 toises en longueur et 23 de largeur, Labrot hÈritera du plus gros morceau, 1240 toises au levant et 25 de largeur.
Notons que dans l'approbation qui suit l'acte, c'est FranÁois qui a la plume la plus incertaine. L'accord n'est intervenu que le 15 janvier de la mÍme annÈe, la tension a dñ monter aux Chazes pendant cette longue quinzaine. Savaient-ils qu'ý cÙtÈ de leurs mesquines discussions, se dessinaient les premiers prÈmices de la RÈvolution ?
Le fermier du moulin d'Audigier:
Une autre facette de notre personnage nous donne la clÈ de ces 33 opÈrations, FranÁois a manifestement la folie des grandeurs, toutes ces sommes minutieusement amassÈes devaient Ítre absorbÈes pour leur plus grande partie par la ferme du Moulin d'Audigier qu'il loue en 1774 au Comte de VoguÈ. MÍme si le mÈtier de meunier ne confÈrait pas bonne rÈputation ý celui qui l'exerÁait, FranÁois tout ý sa quÍte de prestige et d'ascension s'en accommodera jusqu'en 1792. Nous possÈdons les quittances de la ferme du moulin, signÈes par le Procureur de Monsieur le Comte de VoguÈ. L'ÈchÈance du terme pour la deuxiËme annÈe s'ÈlËve ý 750 livres payÈes le jour de la Saint-Michel 1775 comme le dernier de 1'annÈe 1774. Le 28 janvier 1775, FranÁois en a ÈtÈ pour 75 livres de rallonge, retard dÈjý ! La ferme restera stable ý 750 livres jusqu'en 1780, annÈe o˜ le Procureur Dumas la fixe ý 800 livres. Notre homme la versera-t-il sans faiblir ? C'Ètait trop demander, dËs 1782, le 23 dÈcembre 1782 trËs prÈcisÈment, une quittance nous informe des problËmes du fermier PastrÈ, ce jour-lý, il s'acquitte de 1702 livres 48 sols soit deux ans de retard, il a ÈcopÈ de 102 livres 41 sols d'intÈrÍts ! En 1788, notre homme rÈcidive, il s'acquitte le 2 mars de 1600 livres, puis la derniËre annÈe 1792, il se voit imposer de 73 livres 6 sols pour le retard sur une somme de 2100 livres, il est vrai !
Manifestement il n'y a pas pÈcuniËrement parlant, gagnÈ: le Procureur Dumas Ètait sans conteste possible trËs ý cheval sur l'ÈchÈance de la ferme et ne souffrait aucun retard. Les VoguÈ gardËrent leurs seigneuries d'Aubenas, VoguÈ et Rochecolombe jusqu'en 1792, annÈe o˜ ils ÈmigrËrent. Si leur demeure d'Aubenas, le ch’teau devenu HÙtel de Ville a ÈtÈ confisquÈe pour y loger le Juge de Paix de la nouvelle administration, les VoguÈ ne partaient pas sans rien. L'ÈchÈance du bail du Moulin d'Audigier, expire en 1792, et ce n'est pas par hasard. Le 2 septembre 1791, une cÈdule nous rÈvËle l'intention des VoguÈ d'Èmigrer puisqu'ils ont liquidÈ leurs biens.
En effet Etienne Helly un des gros mÈnagers de Saint-Germain a acquis en 1791 de Monsieur de VoguÈ une piËce de terre, champ, prÈ avec le moulin attenant dont FranÁois PastrÈ Ètait le fermier. La cÈdule l'informe que l'acquÈreur a l'intention d'ensemencer les terres «puisque le dit PastrÈ ne devoit plus y prendre de rÈcolte et que d'aprËs lusage celuy qui doit entrer en possession ensemence». De plus, Helly demande des indemnitÈs pour les dÈfrichements que FranÁois y aurait faits. C'est l'Èpoque de la vente des Biens Nationaux, notre mÈnager y serait-il Ètranger ? Rassurons-nous, il aura sa part.
La gestion de son domaine, la ferme du moulin ne suffisaient pas ý assouvir le dÈsir de puissance et l'appÈtit de considÈration de notre homme. Il voulait tout faire ý la fois, jonglait avec profit et souvent ý perte avec les deniers seigneuriaux et ecclÈsiastiques.
LE RECEVEUR DES DIMES DU CHAPITRE DE VIVIERS
Le 2 mars 1779, FranÁois s'est transportÈ ý Viviers pour y signer «I'arrantement» des dÓmes de Villeneuve de Berg et de Saint-Germain. «Par devant» maÓtre Jacques Antoine Garcin notaire royal et «graduÈ» de la Ville de Viviers en prÈsence de Joseph Bernard, chanoine du chapitre, substitut du syndic de l'Eglise CathÈdrale de Viviers, le syndic Monsieur d'Aubignac devait Ítre absent, et de Joseph Delclaux, chanoine de la mÍme Eglise. FranÁois se voit bailler «avec promesse de faire valoir et jouir envers et contre tous en arrantement. . . » la collecte des dÓmes. Il n'est pas seul, l'accompagnent ClÈment Lavalette marchand, Claude Richon mÈnager, et Claude Roux marchand lui aussi, tous de Villeneuve de Berg. Le ChapÓtre n'arrente pas sa dÓme au hasard il fallait que les preneurs aient et fassent preuve de rÈpondant: ce qui situe et permet d'apprÈcier le niveau d'aisance des mÈnagers que ce soit Richon ou notre FranÁois.
Les dÓmes que le «vÈnÈrable Chap~tre» a coutume de lever et exiger, sont constituÈes en grains, vin «charnel», (nous Èmettons l'hypothËse qu'il s'agit vraisemblablement du boudin), «dixmes novales». L'arrentement est valable pour 9 ans et bien sñr «neuf rÈcoltes complËtes». Quelle Ètait la ponction de la dÓme menue, grosse sur les deux paroisses ? 4030 livres, somme considÈrable compte tenu de la population de Villeneuve de Berg et Saint-Germain, ý majoritÈ rurale certes. Cette somme est naturellement payable solidairement (sÈcuritÈ oblige) par les preneurs «I'un pour l'autre et un seul pour tous». Ces prÈlËvements sont rÈputÈs «portables» ý leurs frais et dÈpens au receveur du ChapÓtre Ollivier, les premiers annÈes puis Guyon et enfin Armand. Le bail a ferme prÈvoit les ÈchÈances: la premiËre sera fixÈe «le jour etfÍte de tous les saints», la seconde le jour et fÍte de P’ques, et ce en deux paiements Ègaux. Que devient alors la portion congrue des curÈs, vicaires de Villeneuve de Berg et de Saint-Germain ? Les preneurs sont tenus de la leur verser «quartier par quartier» et par avance de 3 mois en 3 mois, le premier versement intevenant le ler juillet. Si les nobles s'avÈraient ’pres au gain bien servis en cela par leurs procureurs, le clergÈ est loin de se laisser dÈpouiller. La somme fixÈe par le bail stipule qu'il n'y a aucun espoir de diminution «par aucun cas qui peut arriver» prÈvu ou imprÈvu, «opines et inopines», grÍle, sËcheresse, inondation, gelÈe «et autres accidents du ciel» (les assurances n'ont pas fait mieux !)
PrÈcisons que la collecte de Saint-Germain incombe au seul FranÁois, ses collogues sÈviront ý Villeneuve dans les limites qui leur sont assignces «jusques ý la Pale d'Auzon», la riviËre servira de limite (sauf la «dixme charnelle» du domaine de Monsieur Baruel, avocat et par lý exempt). Quelle est la part de Villeneuve et de Saint-GRrmain ? Les archives de l'EvÍchÈ de Viviers nous ont livrÈ le dÈtail. Saint-Germain paie plus que le siËge du Bailliage ! 2030 livres pas moins ! Et les 2000 restantes incombent aux habitants de Villeneuve de Berg. Sachant que la Paroisse de Saint-Germain comptait 45 chefs de famille cela fait 45 livres 10 sous 6 deniers par feu (foyer) ! La ponction ecclÈsiastique y est 7 fois supÈrieure ý la capitation, 2 fois la taille ! Avouons que l'EvÍchÈ-ComtÈ de Viviers avait la main lourde. Villeneuve de Berg siËge du Bailliage Ètait peuplÈe d'officiers royaux, de bourgeois, de nobles en rÈsidence et de religieux: la propriÈtÈ fonciËre dans la banlieue immÈdiate de la bastide royale est une propriÈtÈ bourgeoise et nobiliaire: les exemptions Ètaient monnaie courante ! Seuls, les laboureurs qui habitaient en ville et sortaient quotidiennement des murs ainsi que les quelques mÈtaieries dispersÈes sur le terroir de la paroisse, Ètaient soumis ý la dÓme.
Voici FranÁois, collecteur des dÓmes de sa paroisse «dÈcimateur», un autre fleuron ý ajouter ý la couronne de notre mÈnager. Il s'acquitte le 30 dÈcembre 1780 de la somme de 765 livres dernier «acompte» de la ferme pour l'annÈe 1780. Il a dÈjý payÈ 1265 livres (nous ne possÈdons pas les deux premiers reÁus, seulement le dernier) puisque le receveur du ChapÓtrÈ Ollivier le tient «quite sans prÈjudice». Il en sera de mÍme l'annÈe suivante, attestÈe par deux reÁus l'un du 30 juin, l'autre du 26 dÈcembre. La somme indiquÈe par chacun de ces reÁus ne s'ÈlËve qu'ý 765 livres ce qui donne 1530 livres, les 500 restantes constiuent la congrue des curÈs et vicaires de Villeneuve et de Saint-Germain. 500 livres pour le seul curÈ de Saint-Germain, portion congrue qui n'est pas nÈgligeable et qui permettait au berger des ouailles de Saint-Germain de vivre dans une relative aisance, compte tenu des dons des revenus de la fabrique ou du casuel: ce n'Ètait certainement pas le cas de tous les desservants des paroisses du Bas-Vivarais ou du Haut Vivarais. Jean Antoine Poncer, nous soumet la supplique du desservant de Sarras qui ne touche lui que 297 livres, dÈduction faite, il est vrai des frais de «chandelles et huile bÈnite».
FranÁois fait dilligence puisqu'en 1782, il se libËre de la premiËre ÈchÈance le 22 avril 1782 et de la seconde le 23 dÈcembre de la mÍme annÈe. Le 5 mai 1783 il reÁoit quittance d'Ollivier de la somme de 1281 livres: le dÈtail rÈvËle que 534 livres sont en quittance ou «mandus» 747 livres en ragent. Nous ne savons pas si le curÈ avait des revenus autres que ceux de son ministËre: il n'avait pas ÈtÈ payÈ l'annÈe prÈcÈdente, oubli ou la dÓme ne rentrait-elle pas aussi aisÈment que les deux premiËres annÈes ?
1783, les mauvaises rÈcoltes seront une cause lointaine de la RÈvolution. Le 29 dÈcembre, FranÁois clÙt l'exercice 1783: le terme est Èchu depuis Toussaint ! Soit 988 livres <<scavoir» 714 livres en argent, 24 livres «pour 1'huile de la lampe» de l'Èglise de Saint-Germain et 250 livres en quittances: la somme a dñ Ítre pÈniblement recueillie, la campagne a ÈtÈ dÈsastreuse, blÈ et vin ont fait dÈfaut si l'on en croit la sommation de comparaÓtre devant le SÈnÈchal de Villeneuve de Berg, prÈsentÈe aux preneurs du bail des dÓmes. Le 2 mai, le terme Èchu ý P’ques n'a pas ÈtÈ versÈ, le mÍme jour une lettre du «sindic du VÈnÈrable Chapctre» supplie le SÈnochal «duser de saisie et exÈcution» solidairement des quatre preneurs non sans avoir au prÈalable prÈcisÈ les clauses du bail de mai 1779. Nous ne savons pas quel fñt le dÈnouement de l'affaire pour les trois dÈcimateurs de Villeneuve de Berg, mais celui de FranÁois prend un tour franchement comique. Notre homme avait-il senti venir le vent: il s'acquitte du terme Èchu ý P’ques rÈclamÈ le 2 mai comme par hasard, le 5 mai et au frËre du Receveur du ChapÓtre qui avait dñ monter ý Villeneuve de Berg pour tÈmoigner de l'affaire. Le 23 novembre il s'acquitte du second terme: chat ÈchaudÈ craint l'eau froide !
Il n'empÍche que si lui, avait ÈtÈ lavÈ lors de la sÈance du 22 mai au siËge de la SÈnochaussce, il lui incombe le 27 mai de payer pour les fermiers de Villeneuve 250 livres. La dÓme rentre mal, de par sa lourdeur, elle est mal reÁue par la population, ce qui ne facilite guËre la t’che de notre collecteur embarquÈ dans cette galËre pour neuf ans ! 1784 ressemble comme une s¦ur jumelle ý 1783, une quittance du 16 fÈvrier 1786 fait Ètat de retards pour les quartiers de juillet et octobre 1784: Notons que cette annÈe-lý la congrue du curÈ pour le premier semestre s'ÈlËve ý 265 livres. 1785, pour une fois l'adage «les annces se suivent... » est pris en dÈfaut: le premier terme ne sera remis au nouveau receveur du ChapÓtre Guyon que le 29 juin avec «du surplus de la solidaritÈ et des fraix qui se sont faits sur cet objet». Les mauvaises annÈes s'accumulent, et les problËmes de perception pÈnalisent nos dÈcimateurs: ainsi en janvier 1786, la quittance signÈe par Monsieur Armand, membre du ChapÓtre; FranÁois solde l'exercice de 1785 terme Èchu ý la Toussaint dela va sans dire soit 764 livres 17 sols 6 deniers, les 30 livres 14 sols 11 deniers manquants seront rÈglÈs le 8 fÈvrier. FranÁois n'Èpargnait pas ses pas ou sa monture.
A peine a-t-il soldÈ le compte de 1785 que la campagne de 1786 ne va pas dÈpareiller des prÈcÈdentes; la quittance donnÈe par Guyon porte en appendice «reÁu le mÍme jour» la quittance de Monsieur Dussaut, vicaire» de Villeneuve de Berg qui s'ÈlËve pour les quartiers de juillet et octobre ý 26 livres 13 sous 4 deniers. Pauvre vicaire ! 1787, les comptes sont enfin rendus et ý jour: Ceux de 1788 versÈs en retard certes, le 15 juin et le 17 «dexcembre» les termes de 1789 seront aussi scrupuleusement payÈs: C'est, il est vrai, la derniËre annce du bail et le testament des dÓmes de l'Ancien RÈgime.
FranÁois fournit ý Guyon les quittances des neuf annÈes ÈcoulÈes et ce (Oh humour tutÈlaire et frondeur !), le 14 juillet 1789 ! Les nouvelles sont lentes ý venir de Versailles ou de la Capitale au fin fond de la province. FranÁois, non encore vaccinnÈ de ses avatars avec la perception de la dÓme, passe un contrat avec le Sieur Dominique Bouzon, notaire royal, nouveau fermier de la «dixme» de Saint-Germain, ainsi formulÈ «que nous dit Bouzon affermons au-dit Pastres toutes les dixmes que nous aurions ý retirer la-dite annÈe 1789, de luy, de tous ses biens quil jouit cejourdhuy en son propre et du domaine de la Prade qu'il tient en ferme...» moyennant la somme de 240 livres y compris les agneaux. La perception des dÓmes et leur ferme constituaient un rÈel mirage pour notre homme qui dans sa crasse ignorance, n'Ètait pas au courant de l'ouragan qui se prÈparait: il signait le 15 juillet 1789 ! le Roi est bien loin, les dolÈances qu'il a dictÈes au printemps 1789, au greffier Vincent, n'Ètaient pas porteuses d'espoir. Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras !
"Le bon mesnager":
FranÁois reste avant tout, un mÈnager: son domaine est vaste, il l'a homogÈncisÈ patiemment; nous avons vu que les Èchanges faisaient suite aux ventes et aux achats. Le domaine des Chazes reste et demeure terre ý blÈ, mais FranÁois PastrÈ avait dÈjý optÈ pour l'Èlevage des ovins et la culture du mñrier qui donne les matiËres premiËres, laine et soie, sources de revenus apprÈciables et d'avenir.
On peut se poser la question: comment pouvait-il faire face ý toutes ses obligations, fermier du moulin d'Audigier, percepteur de la dÓme et celle de mÈnager ? Il emploie deux valets, l'un s'appelle Pierre Ganivet, l'autre Anthelin: un reÁu du savetier nous rÈvËle leurs noms: le maÓtre des Chazes outre le paiement de leur quote, les chausse ! La capitation de 1782 nous permet d'y ajouter un berger et une servante: FranÁois paie pour eux 6 livres, 12 sous. Il est sñr que les charges des terres, labours, hersage, semailles et garde du troupeau incombent aux valets et berger sous la surveillance Ètroite du seul FranÁois. Elisabeth, son Èpouse a dÈjý fort ý faire avec sa nombreuse maisonnÈe: pas moins de huit enfants tous vivants. Leur naissance s'Ètalera avec une belle rÈgularitÈ de deux ans en deux ans: les deux aÓnÈs sont deux filles, Marie nÈe le 22.11.1768, Elisabeth le 04.05.1770, et bien sñr celui qui continuera la lignÈe, FranÁois nÈ enfin le 17.10.1772.
Deux Ètats des troupeaux «que FranÁois PastrÈ, Etienne Helly et Michel Doyze rentier de ville ont menÈ ý la motagne» en 1784 et 1786 rÈvËlent un troupeau important de moutons sur le territoire de la paroisse. Les maoufactures sont en pleine extension; le drap du Languedoc s'exporte. Nos mÈnagers ne veulent pas Ítre en reste pour recueillir la manne des «bestes a layne». Nous comptons pas moins de 1402 tÍtes. Michel Doyze en possËde ý lui seul 13 fois 30 ! Etienne Helly «140» et FranÁois pour sa part «123». Ce sont les trois gros propriÈtaires, nul doute qu'ils aient tenu ý aller quÈrir eux-mÍmes leurs biens ! En 1786, l'opÈration de transhumance vers la rÈgion du Tanargue plutÙt que vers le Coiron trop proche et assez peu ÈlevÈ, rapporte aux trois compËres 102 livres, 4 sous: FranÁois reÁoit 46 livres, Helly 42 livres 12 sous et Doyze qui devait avoir dÈjý fort ý faire avec ses 390 moutons, seulement 13 livres 12 livres. La tonte avait lieu ý la fin du printemps puisque les «fileuze on commancÈ le 12 juin». Toute la paroisse devait s'adonner ý la joie de filer la quenouille: 15 journÈes de filage «au moy» de juin (sauf le dimanche), 24 journÈes en juillet et 21 en «aoust»: soit un total de 60 journÈes de filage. Les femmes et les servantes en sus des t’ches mÈnagËres, de l'Èducation des enfants, du soin donnÈ aux vers ý soie, de la fenaison ou de la moisson, assuraient l'intÈgralitÈ de ce travail. Le travail effectuÈ, il ne restait plus qu'aux marchands d'Aubenas de lever la matiËre premiËre de «leurs pratiques».
FranÁois PastrÈ «faisait aussi du ver ý soie», en effet dans tout le Bas-Vivarais et la BoutiËre o˜ la clÈmence du temps et l'altitude le permettaient, on a plantÈ en bordure des champs, sur les levÈes de terre, le mñrier blanc. Cent cinquante ans aprËs Olivier de Serres, il est vrai, c'est une richesse pour la plaine et le Vivarais CÈvenol. Pas moins de 500 mÈtiers battent ý Aubenas, 400 ý Privas
Les fermes et leurs magnaneries bruissent. «I'Èlevage du ver ý soie» nÈcessite de la feuille de mñrier fraÓche et sans cesse renouvelÈe. FranÁois devait avoir une magnanerie non nÈgligeable puisque ses mñriers de Saint Germain et de La Villedieu ne suffisent pas ý satisfaire ses chenilles. Il fait venir «la feuille» de Saint-Sernin ou de la Chapelle sous Aubenas. Que l'on soit mÈnager, fermier ou mÍme brassier, tout le monde <<fait du ver ý soie». La vente des cocons servait dans la tradition orale (Je remercie Madame Gervais AimÈ habitante de Saint-Sauveur de Montagut et Madame Salles de Branoux les Taillades pour ce renseignement), ý constituer la dot des jeunes filles de la plaine et de la CÈvenne. Plus prosaÓquement et comme le rappelle un article du «Cayer de dolÈances» (Archives dÈpartementales - Privas) de la communautÈ de Saint-Germain repris en Ècho par celui de Saint-Sernin, cette vente a une autre destination «attendu que les cacons sont le seul objet qui procure de l'argent pour payer les impÙts».
L'esprit Èclectique de notre homme avait anticipÈ sur le siËcle suivant et avait vu dans le dÈveloppement de cette activitÈ une possibilitÈ de crÈneau et de profit. FranÁois sera aussi «leveur» de cocons, comme nous le confirment des reÁus datÈs de 1787, 1788, et 1789. Le 14 juin 1787 Mathieu Amblard de La Villedieu lui a livrÈ «54 livres et six onces cocons», Jean Reynaud de Saint-Sernin «103 livres et 7 onces», le 15 juin de la mÍme annÈe, Raoulx de Rochecolombe «6 livres et 2 onces», Louis Gimon de La Chapelle sous Aubenas «64 livres et 4 onces». Notre homme sillonne la campagne voisine, «lËve la feuille» pour ses propres magnans et les cocons qu'il livre ý Monsieur Durand d'Aubenas, courtier ou grossiste, voire manufacturier de «soyÈ». Nous n'irons pas jusqu'ý dire que FranÁois y prenait un substantiel bÈnÈfice d'autant que les quelques reÁus que nous possÈdons traitent de 400 ý 500 livres de cocons ainsi levÈs. Si nous Èvaluons le tout ý 200 kilogrammes, cela nous donnerait une belle montagne ! C'est une activitÈ qui s'avËre lucrative puisqu'en 1792, FranÁois lËvera feuille et cocons chez les mÍme fournisseurs ý un dÈtail prËs cependant, il les rËglera cette fois en assignats (le m’tin !), et se fera payer, lui, en «numÈraire mÈtallique».
Notre mÈnager n'Èconomisait pas ses pas et le maÓtre des Chazes devait faire aller toute sa maisonnÈe filles, valets, bergers et servantes ý sa cadence ý en croire une facture du 20 juillet 1786, facture qui s'ÈlËve ý pas moins de 70 livres 7 sous de chaussures et rÈparation comprise ! Voyons plutÙt: 26 juillet «saimele pour fille ainÈ... saimele pour goujat... 21 sous souliÈ pour sairvante... empaigne pour ledit Ganivet... saimaile pour filie cadete... 3 saiptambre souliÈ pour le paire... 25 saiptambre romontage escarpain pour la mer... dudit saimele. . . saimaile pour valait Antelain. . . » Le petit monde de l'Èchoppe, s'il a une orthographe balbutiante est lettrÈ, et le calcul a moins de secret pour lui que pour FranÁois qui s'acquitte de 12 sous auprËs du greffier pour faire vÈrifier l'exactitude de l'addition ! (Qui a dit que nos ancÍtres allaient pieds nus ou en sabots ? Voilý un beau dÈmenti aux partisans des «bergeries») Le maÓtre de Chazes n'a pas assez d'instruction ou pas du tout pour se lancer dans le nÈgoce, son fils FranÁois lui prÈfÈrera la manipulation du cadis ou de la toile de «silÈzie» ý celle des mancherons de la charrue de son pËre.
FranÁois est devenu, sans nul conteste possible, un personnage: nous l'avons vu dÈployer une activitÈ fÈbrile dans le remembrement de son domaine, traiter avec circonspection et tÈnacitÈ cete fabuleuse sÈrie d'Èchanges, contre-Èchanges, achats et ventes. Parmi ceux-ci il est une vente dont l'historique nous est parvenu sous la forme la plus complËte qui soit, de sa genËse en 1770 ý son dÈnouement le 2 novembre 1813 ! Si FranÁois Ètait ý l'affñt des bonnes affaires, malgrÈ les liquiditÈs dont il pouvait disposer de ses multiples emplois, il n'empÍche qu'il Èprouvera des difficultÈs ý honorer scrupuleusement sa dette, d'autant qu'il s'Ètait engagÈ ý long terme: c'est son fils qui Èpongera la crÈance. Nous connaissons la date de l'achat, le «ler may» 1782, reÁu par maÓtre Raoulx notaire, les droits de lods et ventes payÈs par FranÁois qui s'ÈlËvent ý pas moins de 2000 livres ! Mais pas le montant de la vente. Nous ferons le calcul suivant: sachant que dans la sÈrie des achats prÈcÈdents, ces droits reprÈsentent le plus souvent 10 ý 11 % de l'opÈration, le domaine achetÈ ý Alexis Helly du Mas de Mathon de la ville de Viviers, s'ÈlËverait ý la coquette somme de 21 000 livres. Nous avions vu juste 21 144 dont 21 000 en capital et 144 en intÈrÍt. Quittance du 5 ventÙse au 6. (Archives dÈpartementales).
Beau domaine sans doute, FranÁois ne pouvait laisser passer l'affaire !
L'AFFAIRE HELLY-PASTRE
Le quinziËme jour du mois d'Aoust» 1770 par devant maÓtre Rigaud, Suzanne Courtiol veuve d'Etienne Crozier, de Saint-Germain, contracte une obligation d'un montant de 99 livres au profit de Claude Revergier de la paroisse de Pradons, habitant «a prÈsant au lieu de La Villedieu». Ces 99 livres qui semblent (La prÈsence de ce reÁu Ètranger ý FranÁois PastrÈ et en sa possession confirme cette hypothËse) Ítre ý l'origine de la vente de 1782, auront fait boule de neige. La veuve Crozier se trouvait certainement dans l'embarras pour hypothÈquer ses biens soumis aux cours de Monsieur le SÈnÈchal et siËge prÈsidial de NÓmes. Les dettes ou les alÈas de rÈcoltes mÈdiocres ou plutÙt et sñrement l'incurie d'Etienne Crozier qui est mort sans doute «abintestat» obligent Suzanne Courtiol ý passer un accord avec son gendre Jean Chamontin mari et «ma~tre des biens dotaux de feue Anne Crozier» et habitant le mas de Rieufrazen ý Ruoms. Le gendre et la seconde fille Jeanne mariÈe avec Alexis Helly se sont retournÈs contre Suzanne et l'obligent au partage. Chamontin a ÈtÈ, si l'on peut s'exprimer ainsi, servi par le dÈcËs de sa femme Anne et par ceux de leurs deux enfants: il rÈclame la liquidation des biens dont le total s'ÈlËve pour sa part ý 3231 livres 5 sols dont il lui revient la moitiÈ. Ce n'est pas tout, d'aprËs les piËces justificatives qu'il produit, il a une autre raison ý pousser ý la liquidation, qui consiste en «ses hypothËques directes» sur les biens qui atteignent 4100 livres. Il ne se tient pas quitte pour autant, il prÈtend ý plus encore: Ètant donnÈ «les mÈlliorations... croit et augmentations des meubles et cadaux... par lui faite. . . »
La fille n'est pas en reste pour dÈpouiler sa mËre qui s'y soumet, mÍme si l'acte dit pudiquement que «les parties ont convenu et accordÈ...» L'opÈration rapportera ý Chamontin 6000 livres qui lui sËront payÈes en deux paiements de 3000 livres dans un an comptables du 28 novembre avec toutefois, cela va sans dire, le paiement de l'intÈrÍt au denier vingt (5 %).
Le 6 avril 1781, les difficultÈs de Suzanne persistent, elle s'oblige ý payer au 30 mars 1782 ý FranÁois Fargier de Saint-Germain la somme de 189 x 19 sous et ce <<pour argent de prÍt»: les intÈrÍts peut-Ítre de la somme due ý son gendre. Qu'avait ý y voir Franc,ois PastrÈ ? Au dos de l'obligation il a ÈtÈ ajoutÈ au dessous des deux parties «ledit PastrÈ a payÈ pour Helly la somme contenue en la prÈsente. . . » Rappelons qu'Alexis Helly est le mari de Jeanne Crozier fille de Suzanne Courtiol et d'Etienne Crozier, qui le 11 juin 1782 «degrÈ en reconnaissance des bons et agrÈubles services qu'elle a cy devant reÁu, reÁoit journelement et espere recevoir ý l'avenir» (L'administration a parfois de l'humour ou veut-on nous faire croire que Jeanne avait fait ¦uvre pie en recueillant sa mËre) lËgue la totalitÈ de ses biens. Mais Suzanne avait du ressort, cette donation n'a rien d'une capitulation, elle Èmet une rÈserve qui peut prendre ý la fois figure de rente viagËre et de testament. Suzanne recevra en contrepartie «deux cents livres» ý chaque 11 juin et jusqu'ý son dÈcÈs, et il incombe aux bÈnÈficiaires, les Èpoux Helly, d'avoir ý faire l'annÈe de son dÈcÈs «pour le repos de son ’me» des aumÙnes de 36 livres et des messes ý concurrence de 60 livres. Les hÈritiers consentent avec gr’ce ý ces clauses d'autant que la donation est ÈvaluÈe ý 10 000 livres. La galette valait bien une messe !
Si les Helly s'Ètaient rÈjouis ý la minute de la donation, ils vont bientÙt dÈchanter. Un acte notariÈ (Archives dÈpartementales Archives notariales folio 304) rÈvËle qu'outre les 71 livres 8 sols de droits de quittance, 100 autres ý l'insinnation du PrÈsidial de «Nismes», 219 livres pour une «fausse dÈclaration» de 11500 livres pour la vente d'un «domaine et immeubles» effectuÈe le ler mai 1782 en faveur de Francois PastrÈ ! Les Helly, Courtiol et consorts Ètaient certainement de connivence et se voyaient obligÈs de rÈgulariser leur entente avec amende certes, mais aprËs coup ! Rendons hommage ý la vigilance et ý la conscience professionnelle des officiers de la sÈnÈchaussÈe de Villeneuve de Berg, pourtant dÈcriÈes par les cahiers de dolÈances de 1789. D'autant que le 3 novembre de la mÍme annÈe, Pierre Helly, mÈnager du mas de Mathon s'empresse de faire notifier la vente qui «pourroit Ítre querellÈe pour n'avoir pas autoritÈ», son fils Alexis «Ètant sous sa jouissance» ! «L'amende» du 11 juin s'avËre bÈnigne et la bonne volontÈ des administrateurs de Villeneuve de Berg, patente !
L'argent en sous-main perÁu de la vente de Suzanne Courtiol ý FranÁois PastrÈ par gendre et fille interposÈs, permet ý Alexis de payer les 2 999 livres, 19 sols (le sol manquant est-il ý l'origine du franc symbolique ? il est loisible de le croire.) ý son beau-frËre Chamontin, et la quittance rappelle dans un deuxiËme temps que cette somme «provient des deniers et argent propres» de FranÁois reconnu «mÈnager» ý Saint-Germain qui demeure «quitte, acompte comme dessus». L'annÈe suivante, le 18 octobre 1783, Alexis Helly se rendra ý Saint-Germain pour percevoir 722 livres, 10 sols pour «pension d'autre plus grande somme». Le 14 juillet 1784, il perÁoit 150 x d'intÈrÍts de la constitution de rente dont le terme «Èchoira qua le Saint-Michel». 1785, ce sont ý nouveau 722 livres, 10 sols qui sont «emboursÈes». Le 22 fÈvrier 1787, FranÁois, qui a du retard dans son paiement pour 1786 s'acquitte de 708 livres, 2 sous. 1788 ce seront 684 livres, 10 sous. La quittance du 18 mars 1789 nous Èclaire sur les diffÈrences des termes et ÈchÈances, outre 680 livres, 10 sols, FranÁois s'acquitte auprËs d'Alexis Helly en vin et bois.
1790, si les impÙts royaux et seigneuriaux, voire ecclÈsiastiques, rentrent, mal ou peu, victimes qu'ils sont des troubles rÈvolutionnaires, mal reÁus et mal perÁus, les transactions privÈes vont autrement. Le ler mai FranÁois se libËre de son annuitÈ de 680 livres, 10 sous; les annÈes passent vite, le 26 janvier 1791, il devait disposer de plus de facilitÈs encore puisqu'il compte ý son crÈancier 1916 livres, les ÈchÈances de 1792 et 1793 seront ponctuellement honorÈes. La pÈriode rÈvolutionnaire semble sourire ý notre homme. Nous ne sommes pas loin de le soupÁonner de disposer de rÈserves de grain qui faisaient tant dÈfaut et d'en spÈculer, d'autant que la tourmente lui a donnÈ parfois du rÈpit pour s'acquitter. Le 5 germinal «lan deux de la RÈpublique» il paie ý Alexis Helly 631 livres, 4 sols et «une charge et demv» de vin pour cette mÍme annÈe 1793 «vieux stille»: le 13 fructidor et la «seconde annÈe rÈpublicaine», la campagne a ÈtÈ bonne, ce sont 2000 livres qui sont remboursÈes par le «Citoyen» du mas de Mathon. De l'an 3 il n'en est pas question nous pouvons annoncer que l'annÈe prÈcÈdente, FranÁois s'Ètait acquittÈ pour 3 ans.
Le refrain des quittances continue ý s'ÈgrÈner le 30 thermidor an 4, 724 livres sont remises ý Helly devant maÓtre Gontier notaire ý Villeneuve de Berg. FranÁois prend un soin particulier de ses affaires, outre les quittances dñment conservÈes, il pousse le scrupule et le soupÁon jusqu'ý faire dresser ses comptes: nous nous permettrons de les attribuer, sans avoir ý beaucoup nous avancer, ý la plume du maitre d'Ècole AndrÈ Chazes. Les 724 livres prÈcÈdentes sont comptabilisÈes avec d'autres paiements effectuÈs par FranÁois, ainsi <<payÈ ý Guyon 2900 livres; ý Helly dans la vente 3144 livres ý Helly le 18 mars 1783, 3000 livres, ý Reverger (que nous connaissons) 460 livres, ý Helly le 29 thermidor au 6, 766 livres». L'addition s'ÈlËve ý pas moins de 18 910 livres. Si FranÁois savait emprunter, il s'avait aussi honorer ses engagements et nous ne pouvons que nous incliner devant son esprit d'ý-propos et son sens aigu des affaires. (1) (Les Archives que nous possÈdons fourmillent de ces petits comptes et leur Ècriture stylÈe n'est pas l'hÈsitante de FranÁois, mais bien celle de l'autoritaire maÓtre d'Ècole de Saint-Germain.)
L'an 6, I'affaire semble prendre une autre tournure: le 29 thermidor, ce qui confirme l'hypothËse Èmise plus haut, FranÁois PastrÈ rËgle la somme de 766 francs ý Alexis Helly qui promet devant le notaire Gontier, de faire ratifier la vente de 1782 «a ses enfants lorsqu'ils auront atteint lage de la majoritÈ» ! FieffÈ coquin d'Helly qui avait vendu la donation de sa belle-mËre alors qu'il Ètait sous «la jouissance» paternelle, et qui n'est rien d'autre que le pËre et administrateur de «la personne et biens» de ses enfants mineurs ou pupilles ! Le Mas de Mathon ý Viviers contenait une authentique communautÈ paysanne (H. Dussourd op. cit ;) o˜ le «Bayle» gËre les biens propres ý la communautÈ et dotaux des belles-filles et assume la tutelle des mineurs. O˜ en sommes-nous de nos comptes le 5 VentÙse an 6 ? FranÁois a payÈ 11 100 livres, plus 144 livres, soit 11 244 livres qui retranchÈs ý 21 144 livres donnent 9 900 livres que «ledit PastrÈ» doit encore en capital ý Helly. FranÁois rÈduit sa dette, ce mÍme jour de 766 livres, ce qui donne 9 134 livres si le capital restant dñ est de 9134 livres, «I'intÈrÈt» est chaque annÈe de 495 livres ! FranÁois est en fonds, le 20 frimaire de cette annÈe 6, 980 livres s'ajoutent aux prÈcÈdents, suivies le 25 VentÙse an sept d'un acompte de «quatre cents francs» et d'un autre de 240, mais le 29 fructidor an neuf de seulement «Cent seize francs». La bonne fortune du mÈnager des Chazes prÈsentement citoyen, rÈputÈ «notable et propriÈtaire foncier» aurait-elle tournÈ ou cherchait-il ý gagner du temps ? Nous avons vu ~uste.
Le lendemain, a lieu l'accord de ratification de la vente par les enfants, I'an six, mineurs, majeurs aujourd'hui, d'Alexis Helly: «les citoyennes Marie Magdelaine et Marie Roze, filles majeures et hÈritiËres de leur mËre Jeanne Courtiol dÈcÈdÈe.» Ces demoiselles en attendant mieux, contestent la vente, prÈtextant notamment «sur lezion qui pourrait y avoir» et sont «sur le point d'actionner contre le dit PastrÈ pour voir recinder et conceller la dite vente... soit par dol fran de lezion...» Rien moins que cela ! Rassurons nous, ce jargon et ces contestations ne sont que formels. L'accord se fait non sans qu'elles aient «traitÈ, trangige» sur le tout ý tire irrÈvocable comme suit: «en premier lieu», elles renoncent coujointement et solidairement ý toute contestation, «en second lieu», elles entÈrinent la vente de 1782, (dans toutes ces palabres, tout le monde trouve son compte et particuliËrement MaÓtre Laville le notaire de Viviers !), non sans avoir Èmis les rÈserves d'usage. Le «premier de l'an neuf» (sic) Helly passe, comme par hasard ý Saint-Germain pour percevoir l'intÈrÍt couru de l'an 7 et de l'an 8 soit 683 livres, et ce en «matiËre mÈtallique». Nos hommes se dÈfient de l'assignat ou du mandat territorial, victimes de l'inflation, et les espËces sonnantes et trÈbuchantes avaient leur faveur.
Si la confiance n'Ètait pas le point fort d'Helly, FranÁois le lui rendait bien. Une inscription au Bureau de la conservation des hypothËques (Archives dÈpartementales - Privas - Folio 11 n¯ 429) fait apparaitre la finesse du maÓtre des Chazes qui n'hÈsite pas ý se dÈlester de 23 livres pour y faire inscrire sa crÈance. Et ce «pour suretÈ» en cas d'Èvicton du domaine «a luy vendu»: FranÁois se prÈmunit, il y est inscrit qu'il Èvalue les «sommes payÈes» ý 14 000 francs (il a produit ses quittances) (cela conforte nos prÈcÈdents comptes) et les dommages ou indemnitÈs ý 1 000 francs. Le voilý parÈ et rassurÈ ! Helly lui rend la politesse en lui adressant copie de l'acte de mariage de sa fille Anne avec Louis Armand. La fiancÈe outre «ses nippes, effets, dorures et hardes» ÈvaluÈs ý 120 francs, se constitue en biens dotaux de sa mËre Jeanne de 2 000 francs que «ledit Armand pourra retirer, percevoir et faire payer» par, nous l'avions devinÈ, FranÁois PastrÈ qui a payÈ entre temps 204 francs d'intÈrÍt. Autant qu'Alexis n'aura pas ý dÈbourser ! Il est coutumier du fait, l'an 10 par deux fois, FranÁois se rend ý Viviers pour rÈgler ses annuitÈs: le 16 Brumaire et 14 VendÈmiaire pour y trouver outre Helly et son gendre Louis Armand, mais aussi deux frËres Claude et Antoine Guyon crÈanciers d'Helly ou plutÙt futurs gendres. Par acte passÈ «ce jour d'huy», FranÁois paie ý l'un et ý l'autre des frËres Guyon, 400 francs. Singulier personnage que cet Helly qui paie ses dettes par personne interposÈe. (On n'a pas fait mieux depuis avec l'endossement des chËques bancaires). Cet an dix, FranÁois n'a payÈ que les intÈrÍts du capital restant dñ: il s'acquittera l'an 11, le 23 frimaire, et du capital soit 1600 francs, et des intÈrÍts soit 200 francs: les 1600 francs seront en fait payÈs ý Jean Guyon, l'Èpoux du Marie Magdelaine Helly. Celui-ci avait reÁu l'an 7 pour acompte de la dot de sa femme 400 francs (1) (d'aprËs les comptes tenus par le maÓtre d'Ècole AndrÈ Chazes, maire de surcroÓt de la commune de Saint-Germain).: 400 plus 1600, voilý la constitution de dot de l'aÓnÈe rÈglÈe, et somme toute Ègale ý celle de la cadette: il n'en a rien coñtÈ au compËre Helly. An 11, le 12 florÈal, ce sont seulement 80 francs «en numÈraire» qu'Helly vient percevoir ý Saint-Germain: l'an 12 aprËs le rËglement de la somme de 173 francs, intervient une interruption de neuf ans dans les paiements.
Cette interruption n'a d'autre explication que la mort de l'un des compËres (Alexis Helly meurt ý la fin de l'annÈe 1803) et les difficultÈs de sa succession. Les hÈritiers, une fois leurs diffÈrents dissipÈs vont mettre bon ordre dans leurs affaires. Le 25 juin 1811, Jean Servier «fils majeur de Bernard, mari et ma~tre des biens dotteaux de Magdelaine Helly», la troisiËme fille d'Alexis Helly ou la veuve de Jean Guyon remariÈe, reÁoit de FranÁois PastrÈ fils 211 francs et 70 centimes. Cette somme se dÈcompose ainsi: 100 francs d'intÈrÍts de l'annuitÈ de 2000 francs (3e dot) Èchue le 19 fÈvrier 1811 et 111 francs et 70 centimes de celle ý Èchoir en 1812. Viennent s'ajouter ý cette quittance 234 autres francs «des causes de 1'acte de vente» consentie par Alexis Helly ý FranÁois PastrÈ pËre 29 ans plus tÙt. (Le 30 dÈcembre 1812, FranÁois fils fait opposition contre Jean Antoine Helly (tels pËres, tels fils !): «le propriÈtaire foncier» des Chazes «est opposant» au commandement qui lui a ÈtÈ fait et signifiÈ le 23 dÈcembre courant pour les raisons qui suivent. D'abord tous les cosuccesseurs d'Alexis Helly n'ont pas ratifiÈ la vente, ratification ý laquelle Helly s'Ètait promis comme nous l'avons vu de se soumettre, et puis ces successeurs sont au nombre de «sept ou huit» et parmi eux certainement des mineurs. FranÁois prÈtend ensuite qu'il ignore si le solde de la dette paternelle appartient ý Jean Antoine Helly ou aux autres et si le partage des biens du pËre et de son Èpouse a ÈtÈ fait. Et enfin le requÈrant a bien peur que «feu son pËre» ait «surpayÈ» le prix de la vente. Un extrait de cette vente est adressÈ ý FranÁois en 1813: elle nous Èclaire sur la rÈalitÈ dÈ la vente que nous avions ý peine entrevue ý son origine faute de la possÈder ou de l'avoir trouvÈe. Le domaine vendu par Helly comprenait une «maison, grange, prÈs, terres cultes et incultes, vignes, jardins, hermes, devois, claux». Il est tout ý l'honneur de feu FranÁois PastrÈ d'avoir toujours et rÈguliËrement honorÈ sa crÈance, et tout au dÈshonneur d'Helly de n'avoir pas tenu ses engagements qui expliquent les interruptions de paiements. Jean Helly, le 21 juillet 1813 vient toucher 20 francs d'intÈrÍt aux Chazes: il faut croire que sa situation n'Ètait pas reluisante et son besoin pressant ou la confiance ne rËgnait pas du cÙtÈ du mas Mathon, puisque l'acte de 1782 stipulait que c'Ètait FranÁois qui devait se rendre ý Viviers. La succession d'Helly avait dñ Ítre mouvementÈe.
En effet, une lettre datÈe du 26 fÈvrier 1813 Èmanant du notaire de Viviers en lieu et place de Jeanne Marie Helly veuve Roussel, rÈvËle le coude ý coude que se livrent les successeurs. Cette lettre rÈclame ý FranÁois 825 francs pour Jeanne Marie ý qui son pËre devait 900 francs de «droits lÈgitimaux» et prÈtend qu'elle a ÈtÈ chargÈe de prendre 825 francs sur ce que doit FranÁois (4e dot). La lettre «prie» le nouveau maÓtre des Chazes de lui compter 300 francs sous huitaine, elle en a une «nessesite absolue», mais la suite de l'affaire et de la lettre nous Èclaire singuliËrement sur la manceuvre de Jeanne Marie, digne fille de son pËre. A dÈfaut de ce paiement exprËs, elle «seraitforcÈe» de mettre en cause tous ses neveux qui par suite, le poursuivraient. C'est proprement du chantage, Jeanne Marie a voulu «doubler» ses cosuccesseurs. «Beau panier ý crabes» que les occupants du mas Mathon ! (Le 2 novembre 1813, l'achat fait par FranÁois PastrÈ pËre, devenu l'affaire Helly - PastrÈ va enfin se solder dans l'Ètude de MaÓtre Dominique Bouzon, notaire ý Viviers. Ils sont tous lý, les hÈritiers d'Alexis Helly ! Antoine Helly «cessionnaire», Catherine Imbert deuxiËme Èpouse et veuve d'Alexis pour le compte de sa fille «Rozine», Jean Servier mari de Marie Magdelaine, Jean Louis Armand Èpoux d'Anne, Jean Guyon au nom de sa femme Jeanne Marie Roze, Jeanne Marie veuve Roussel et Jean Helly enfin. Ils dÈclarent avoir reÁu «conjointement et solidairement» la somme de «huit cent quatre vingt quatre francs 15 centimes» pour reste et entier paiement du prix de l'acte de vente consenti le ler mai 1782 par Alexis ý FranÁois pËre ! Jeanne Marie a dñ attendre huit mois ses 300 francs dont elle avait une si absolue nÈcessitÈ ! FranÁois avait des raisons de se mÈfier d'autant plus que la succession de son pËre lui valait les mÍme tracas avec ses frËres et soeurs.
L'accaparateur de biens nationaux:
1791. On sait que sur la proposition de l'EvÍque d'Autun, Talleyrand, l'AssemblÈe pour essayer de combler le dÈficit national, dÈcida de vendre aux enchËres et par lots, les biens de l'Eglise. Cette vente servirait ý garantir l'Èmission d'un papier monnaie, l'assignat. Monseigneur Charles Lafont de Savine, ÈvÍque de Viviers est, nous l'avons vu, l'un des quatre ÈvÍques ý prÍter serment de fidÈlitÈ ý la Constitution Civile du ClergÈ le 6 fÈvrier 1791 et des tout premiers ý soutenir cette proposition. En Vivarais, les riches propriÈtaires, les notables dont ceux d'Aubenas seront les premiers servis. Ainsi Cachon et Chalvet nÈgociants et juges du Tribunal de Commerce de cette ville avaient achetÈ en bloc l'abbaye de La Villedieu, le couvent des BÈnÈdictines et ses dÈpendances. Le Directoire du District du Coiron leur avait consenti la vente le 4 mars dernier. N'en ayant pas une rÈelle utilitÈ, sinon que cet achat constituait un excellent placement d'argent et une occasion de spÈculer. De plus la valeur des biens mobiliers et immobiliers du couvent devait largement dÈpasser les possibilitÈs de n'importe quel mÈnager de la rÈgion. Et seuls de riches personnages tels que Chalvet et Cachon qui disposaient de liquiditÈs et de rÈpondant, pouvaient y prÈtendre.
Ils avaient vu juste et n'Ètaient pas sans savoir que les gros fermiers du village de La Villedieu ou des villages voisins se feraient un point d'honneur de racheter une part du domaine. Nul doute qu'un tel achat puisse tenter notre FranÁois PastrÈ. Pensez ! Racheter la maison ý laquelle ses ancÍtres et lui-mÍme venaient frapper, chapeau bas et l'air compassÈ, et payer les cens et rentes qui pesaient sur leurs terres.
Quelle revanche et quelle promotion ! L'orgueil plus que l'intÈrÍt pousse FranÁois ý solliciter des deux Juges du Tribunal de Commerce, «accapareurs de Biens Nationaux», une subrogation. Elle a lieu le 16 juillet 1791. Jean Chalvet et FranÁois Cachon d'une part et FranÁois PastrÈ d'autre part se sont donnÈs rendez-vous dans l'Ètude de MaÓtre Meynier, notaire royal d'Aubenas. «Volontairement solidairement, sans division d'action ni de discussions» ils subrogent FranÁois PastrÈ des Chazes «ý l'utilitÈ de la vente des biens de cy-devant abbaye de La Villedieur» la subrogation des biens n'est pas totale. Elle ne comprend que «les objets suivants»: un jardin et ses mñriers, un prÈ et un champ, des buissiËres et rochers o˜ sont des noyers et des mñriers. Sans aucun doute ces «objets» constituaient un tout, un lot qui ne pouvait Ítre dÈtaillÈ. Nous avons situÈ le tout au terroir de La Condamine (la bien nommÈe) paroisse de La Villedieu et qui jouxte le couvent. La subrogation comprend aussi des immeubles et b’timents: soit la partie occidentale du couvent «basse-cour et coridor faisant Èquerre» (il est facile de le situer). Que contient cette partie ? Un appartement «commun aux deux vendeurs et ý leur acquÈreur». Cet appartement Ètait destinÈ ý la perception des rentes de l'Abbaye (FranÁois devait jubiler). La tour attenante faisait aussi partie du lot et la facultÈ de puiser de l'eau dans le <<puy» ainsi que le droit de passage dans la partie orientale acquise par Jean DuprÈ.
Cachon et Chalvet n'abdiquent pas tous leurs droits, en effet ils se rÈservent «le droit de jouir» de l'appartement commun. FranÁois prend possession des immeubles sur l'heure, quant aux terres, il en aura l'entiËre propriÈtÈ le 29 septembre prochain. La subrogation est faite au prix de 15800 livres ! Belle somme et belle source de profit pour nos deux accapareures ! 12 % de la somme ý payer sur le champ et le reste en douze termes ou annuitÈs «le l er nombre». La premiËre ÈchÈance Èchoira le 29 septembre 1792, date anniversaire de la jouissance des champs de la Condamine. L'intÈrÍt total s'ÈlËve ý 2400 livres. Il est vrai qu'il ira en s'amenuisant au fur et ý mesure de l'extinction de la dette. Cachon et Chalvet seraient-ils ingÈnus ou voulaient-ils le faire croire ? Il n'empÍche qu'ils dÈclarent que le montant de la subrogation «n'est pas d'un prix supÈrieur» au prix de la vente du 4 mars ! Cela cache assurÈment quelque chose qui nous est rÈvÈlÈ dans les garanties: en effet au cas o˜ FranÁois n'honorerait pas scrupuleusement et exactement le paiement d'un seul terme, il serait purement et simplement expulsÈ des objets auxquels «il vient d'Ítre subrogÈ» !
Beau miroir aux alouettes d'autant que FranÁois n'entrera en possession qu'en septembre prochain. Il n'est pas dit si le sous-fermier actuel lui laissa la rÈcolte des noix, Cachon et Chalvet s'Ètaient bien gardÈs de le lui garantir ! S'acquitte-t-il sur l'heure ? C'est mal connaÓtre notre homme: il convient avec les deux nÈgociants de leur payer par anticipation sur les douze derniers termes: 2400 livres qu'il paiera le ler mars 1792, 1515 livres d'acompte et le 27 aoñt 885 livres pour «parfait payemenb> et 29 livres d'intÈrÍts.
Le mirage continue. FranÁois PastrÈ s'associe avec son beau-frËre Jean Roume de la mÍme paroisse pour acquÈrir des mÍmes Chalvet et Cachon, un autre lot des biens du couvent et ce le 13 aoñt 1791 ! L'achat comprend un prÈ appelÈ «Le Pont», le long de la riviËre d'Auzon, contenant «neuf septiers, trois quarterons, trois boisseaux», un moulin «o˜ sont trois roues, deux pour moudre le blÈ, » la troisiËme, «pour monder» avec un pressoir pour l'huile de noix, l'Ècluse et le prÈ attenant sont compris dans le lot. Cette nouvelle subrogation est faite sans garantie par les vendeurs. FranÁois PastrÈ et Jean Roume s'obligent solidairement ý payer 1875 livres le ler mars 1792, et le reste en onze termes ý partir du 29 septembre 1792. Vraisemblablement, comme pour la subrogation du 10 juilet prÈcÈdent, I'intÈrÍt, s'ÈlËve au denier vingt (5 %).
FranÁois le 3 mars 1792, il a dÈjý deux jours de retard, se transporte ý Aubenas chez Cachon et Chalvet pour rÈgler sa part de l'achat du prÈ du Pont et du moulin soit 337 livres et 10 sous. En 1793, il accuse du retard, il Ètait le 27 septembre ý Aubenas, il y retourne le 29 pour rÈgler ses autres annuitÈs: il rËgle 1854 livres 13 sous 4 deniers qui avec les 1200 livres dont il s'est acquittÈ le 5 janvier dernier font 3054 livres. Le dÈcompte serait le suivant: 1896 livres pour le paiement des 12 % des 15800 livres de la subrogation de 1791, 1158 livres 13 sous 4 deniers sur le terme Èchu le 29 septembre dernier. Ce mÍme jour il rËgle l'annuitÈ du moulin et du prÈ du Pont: soit 1725 livres dont 1500 livres en capital et 225 livres en intÈrÍts. 1793 a ÈtÈ une bonne annÈe pour notre mÈnager, un reÁu non timbrÈ du ler octobre d'un montant de «treisse cent livres» permet de remarquer la ponctualitÈ du paiement de l'achat du couvent de La Villedieu. Si Cachon et Chalvet n'hÈsitent pas ý frapper d'intÈrÍts tout retard, FranÁois n'a rien ý leur envier en pingrerie: un dÈcompte nous Èclaire sur les opÈrations qui le lient ý son beau-frËre Jean Roume. Au 26 septembre Roume doit ý FranÁois 3000 livres dont 155 d'intÈrÍts !
1794, le 29 septembre date de 1'ÈchÈance, Cachon et Chalvet font un reÁu de la somme de 150 livres pour intÈrÍt de 3000 livres qu'il leur doit (il y a une relation trop Ètroite avec les comptes prÈcÈdents pour ne pas soupÁonner FranÁois de jongler avec l'argent de son beau-frËre et associÈ). Qu'a fait FranÁois des 950 livres que lui a remises Jean Roume le mÍme jour ? Nul doute qu'elles sont allÈes grossir les liquiditÈs de notre homme qui le 22 prairial 3e annÈe rÈpublicaine (1795) rËgle en totalitÈ, capital et intÈrÍts compris sa dette soit 10495 livres 13 sols ! La partie occidentale du couvent et ses dÈpendances lui appartiennent enfin. Qu'en est-il de la dette de Jean Roume contractÈe envers son beau-frËre ? FranÁois avait scrupuleusement ajoutÈ 150 livres aux 3000 dñes soit 3150 livres, moins 950 acquittÈes le 25 septembre 1794, restent 2200 livres, plus 3 livres d'intÈrÍt couru pour 9 jours ! Total dñ 2203 livres. Jean Roume lui rËgle le 13 VendÈmiaire 1795, 600 livres «reste qu'il doit» 1603 livres auxquelles s'ajoute l'intÈrÍt couru du 13 VendÈmiaire au 19 Pluviose: ce qui fait trois mois et vingt jours et donc 24 livres 9 sous d'intÈrÍt ! Ce mÍme jour Roume rËgle ý son beau-frËre FranÁois 1630 livres, qui lui rendra 2 livres 11 sous, (les bons comptes...)
Si FranÁois ne fait pas de cadeau, nous le comprendrons aisÈment toutes les affaires prÈcÈdentes ont contribuÈ ý faire de notre mÈnager une homme d'affaire rouÈ et retors. Le 22 prairial «troisiËme annÈe rÈpublicaine», il avait remis aux deux nÈgociants la belle somme de 10495 livres 13 sous «pour reste de ce qu'il nous devait de la dite subrogation». FranÁois a sans aucun doute bÈnÈficiÈ de la conjugaison d'une bonne campagne agricole, d'une belle rÈussite des vers ý soie, de la tonte exceptionnelle de ses moutons et de l'assiduitÈ des clients au moulin pour rÈunir une telle somme. La campagne suivante sera tout aussi faste: les problËmes de la RÈpublique qu'ils soient extÈrieurs ou intÈrieurs et plus particuliËrement budgÈtaires semblent Ítre Ètrangers ý notre mÈnager puisque coujointement avec Jean Roume, ils dÈcident de solder leur achat du moulin et des terres attenantes, pour lesquels ils avaient ÈtÈ subrogÈs le 13 aoñt 1791. Le 4 VentÙse «an quatre» (1796), notre homme se transporte ý Aubenas chez Jean FranÁois PastrÈ huissier «reÁu en la justice de paix du canton d'Aubenas» pour faire citer les citoyens Cachon et Chalvet le 6 courant pour une conciliation. Il offre 3000 livres pour solder par anticipation la subrogation, plus l'interÍt «lÈgitimement couru». En effet la loi invoquÈe lors de la subrogation sur la suspension des paiements «ne pourra Ètre invoquÈe» attendu qu'il s'agit du paiement du prix d'un Bien National !
Le six VentÙse, Joseph Louis Duclaux juge de paix, reÁoit dans son bureau FranÁois PastrÈ et Jean Roume d'une part et les deux nÈgociants d'Aubenas Cachon et Chalvet. S'entendent-ils ? Certes non, nos deux notables «refusent de recevoir la somme offerte» en exÈcution de la loi du 12 frimaire dernier qui autorise le refus du remboursement des capitaux «par obligation antÈrieure au premier VendÈmiaire», alors que PastrÈ et Roume se prÈvalent de la loi du 3 NivÙse dernier. Le Juge de paix ne peut que remettre aux parties un certificat de non-conciliation. Huit jours plus tard, FranÁois PastrÈ et son beaufrËre font ý nouveau preuve de bonne volontÈ: tous deux se sont rendus chez Jean Vigier huissier ý Aubenas. Ils font offrir aux deux adjudicataires il est vrai, par huissier interposÈ, «rÈellement et oster~siblement» pour «restes et soute parfaite» du prix de la subrogation du 13 aoñt 1791, les 3000 livres plus 325 livres d'intÈrÍts courus. Le dÈcompte de la somme est assez intÈressant et puisqu'elle est constituÈe d'assignats: 5 assignats de 500 livres chacun avec leurs sÈrie et numÈro sÈrie 782 N¯ 896, 2Ë sÈrie 2253 N¯ 18, 3Ë sÈrie 3916 N¯ 369, 4Ë sÈrie 4703 N¯ 898 sÈrie N¯ 492, sÈrie 4796 N¯ 552; 3 assignats de 250 livres sÈrie 8435 N¯ 277, sÈrie 7520 N¯ 492, sÈrie 4821 N¯ 297; 1 assignat de 50 francs sÈrie 3956 N¯ 358, 1 pour voir leur valeur s'effondrer (l'inflation dÈjý) ! Pour le cas o˜ Cachon et Chalvet s'entÍteraient ý refuser la somme offerte, Jean Vigier leur rappelle que ce serait «mal ý propos» de se prÈvaloir de la loi du 12 frimaire relative au remboursement des capitaux puisque cette loi a ÈtÈ dÈclarÈe non applicable par la loi du 3 nivÙse «ainsi que 1'a expliquÈ le Ministre des finances» dans sa circulaire du 6 nivÙse» «dans sa circulaire du 6 nivÙse». A dÈfaut de leur consentement ý rembourser les 3325 livres elles seront consignÈes «entre les mains de qui de droit», c'est ý dire les instances judiciaires dÈpartementales. La quittance de cette somme aura valeur de libÈration pour FranÁois PastrÈ et Jean Roume. Chalvet et Cachon Ètaient-ils allergiques ý l'assignat ? Il est vrai que cet ancÍtre du papier monnaie n'avait pas plus leur faveur que celle de FranÁois: on lui prÈfÈrait, et de loin, le «numÈraire mÈtallique».
Le 1er Germinal, les deux beaux-frËres qui ont mieux retenu la leÁon que les deux nÈgociants se rendent ý Privas pour y prÈsenter un derniËre requÍte de conciliation, et ý dÈfaut de verser dans la caisse nationale les 3325 livres que refusent les deux adjudicataires: ils seront ainsi, croient-ils, libÈrÈs de toute dette. Et c'est cet acte qui nous rÈvËle l'entÍtement de Cachon et Chalvet: ils avaient trouvÈ FranÁois PastrÈ plus retors qu'eux. Si FranÁois avait rÈsolu de se libÈrer aussi vite de sa dette pour «vaincre l'injustice et l'aviditÈ» des deux nÈgociants albenassiens qui, sans aucun doute possible, tenaient fermement ý Ítre payÈs en espËces sonnantes et trÈbuchantes, c'est qu'ils devaient savoir que les deux comparses versaient dans la Caisse Nationale en assignats, et qu'ils ne payaient leurs crÈanciers qu'avec «la mÍme monnoye»
Forts de la dÈcision du tribunal du dÈpartement, FranÁois PastrÈ et Jean Roume s'arrÍtent en chemin ý Aubenas chez l'huissier, JeanFranÁois PastrÈ pour faire citer le 6 Germinal (ý dix heures devant le receveur national, Cachon et Chalvet «pour voir faire « «le dÈpÙt des 3325 livres qu'ils ont injustement et indignement refusÈes !» Si le 6 Germinal, FranÁois PastrÈ et Jean Roume Ètaient prÈsents, fiers qu'ils devaient Ítre d'avoir ý contribuer ý l'Èquilibre budgÈtaire national par leur versement de ces fameuses 3325 livres, il n'est pas utile de dire que les deux nÈgociants n'y furent point. Voilý une affaire rondement menÈe pouvait s'Ècrier FranÁois sur le Chemin de Ville aux Chazes. Cachon et Chalvet ne se tiennent pas pour autant vaincus. AprÈs mñre rÈflexion ou aprËs avoir attendu que dans les instances judiciaires du dÈpartement, les tÍtes aient changÈ et qu'au meilleur des cas, les nouveaux juges soient de leurs amis (Cachon n'Ètait-il pas au camp de JalËs avec tous les notables de la rÈgion ?), ils contre-attaquent. Un jugement du 23 ventÙse an 6, casse celui du 2 Germinal an 4 pour vice de forme ! et soupÁon de partialitÈ ! En effet l'ordonnance rendue le fut par «deux seuls» membres du tribunal. L'offre rÈelle du 14 ventÙse an 4 pour Ítre valable devait Ítre faite par un huissier assistÈ de «deux records» ou par un notaire et devant tÈmoins, et pour le principe, l'intÈrÍt gÈnÈral rÈclamait en faveur de cette derniËre rËgle cette mesure, car s'il en Ètait autrement «les dÈbiteurs de mauvaise foi pourraient pratiquer des fraudes envers leurs crÈanciers !»
Le Jugement cassÈ, FranÁois PastrÈ par huissier interposÈ (Jean Vigier) fait appel le ler florÈal an 6. Cachon et Chalvet, le 20 florÈal, assurent leurs arriËres, puisque par la voix de leur fondÈ de pouvoir «le Citoyen Nivet», ils demandent l'exclusion et l'anticipation d'appel du tribunal de Haute-Loire. Singulier ! L'appel sera jugÈ par le Tribunal Civil de Valence. Le 15 Prairial, FranÁois qui estimait sans aucun doute, avoir ÈtÈ mal servi par l'huissier Jean Vigier, donne procuration au notaire public d'Aubenas, MaÓtre Meynier. C'est pour notre homme une assurance; le notaire saura <<plaider...», fournir des mÈmoires, nommer des dÈfenseurs officieux, faire exÈcuter tout jugement...«de se fournir le cas ÈchÈant et affirmer les frais de ses voyages, sÈjour et retour...» Car FranÁois pensait que ces frais incomberaient ý ses deux adversaires !
19 FlorÈal an 7, le Tribunal de Valence rend enfin son jugement. Devant le PrÈsident Mortillet et les juges Gueymard, Charlon, Malleval et Thorsal, «le citoyen Garde» dÈfenseur officieux choisi par MaÓtre Meynier, demande au tribunal d'autoriser de renouveler «leurs actes» d'offre et de dÈpÙt et de dÈclarer FranÁois et son beau-frËre Jean Roume «bien et valablement dÈlivrÈs de l'entier prix» de la subrogation du 13 aoñt 1791 et bien sñr de condamner Cachon et Chalvet aux dÈpens. Boseran-Desplaces, dÈfenseur des deux nÈgociants avance comme argument que «sans s'arretter ý l'appel» Èmis par FranÁois, le tribunal les condamne, «en l'amende et aux dÈpens». Rendons cette justice ý la loi de l'Èpoque, le tribunal de Valence, pour les mÍmes motifs que ceux du tribunal de Privas, dÈboutera, «les appelants» PastrÈ et Roume et les condamnera ý l'amende et aux dÈpens, rÈclamÈs par Boseran.
Mauvaise affaire pour le mÈnager et ci-devant citoyen FranÁois ! Le 28 florÈal, Jean Chalvet et FranÁois Cachon vont se transporter ý Saint-Germain, oh «pour un jour seulement» dit la notification du jugement, pour jouir de leur victoire. La note s'ÈlËve pour les deux beaux-frËres qui doivent payer «incontinent et solidairement» ý 38 francs et 25 centimes de frais d'expÈdition, ý 192 francs et 25 centimes de dÈpens, ý 3 francs pour frais d'enregistrement et enfin les frais exÈcutifs. Nos deux mÈnagers s'exÈcutent sur l'heure sous peine de se voir saisir. Triste journce pour FranÁois !
Le 2 Prairial par la voix de Jean-FranÁois PastrÈ, huissier civil du district du «COYRON» FranÁois se voit signifier de s'acquitter de ses dettes en «numÈraire mÈtallique» et ý dÈfaut de voir procÈder ý l'estimation des «immeubles ý lui vendus», et ce dans un dÈlai de trois jours. Le mÍme huissier devant le refus de FranÁois PastrÈ et Jean Roume se transporte aux Chazes le 26 prairial an 7 pour les sommer de paraÓtre ý Aubenas pour assister ý la prestation de serment des experts requis pour l'estimation des immeubles, entendons le moulin et les terres attenantes. Les experts ont pour nom: Jean-Pierre Serret d'Aubenas, Duplan dit Bouteille de Pont d'Ucel. Heyraud et Antoine Vigne de La Villedieu. Le 19 VendÈmiaire seulement, les experts aprËs s'Ítre rendus qui ý la Villedieu, qui ý Saint-Germain pour procÈder «au fait» de leur commission et dresser «leur relation, remettent leur rapport. La lecture en est faite devant le directoire exÈcutif siÈgeant au Ch’teau d'Aubenas. Ce rapport est constituÈ de «trois pages et un tiers environ de la quatriËme page»: la notification du rapport expÈdice le 26 du mÍme mois ý FranÁois et Jean Roume: nous ne pouvons que regretter de ne pas avoir au moins une copie.
Chalvet et Cachon, le 30 vendÈmiaire poussent leur avantage et leur arrogance ý se transporter aux Chazes. Ils y encaissent 160 francs et 12 sols 3 deniers dont le dÈcompte s'Ètablit ainsi: 94 francs 18 sols payÈs aux experts, 1 livre 2 sols 3 deniers pour l'enregistrement du rapport, 9 livres 15 sols pour un acte de MaÓtre Teyssier, 15 francs pour la notification du 26 courant, 10 livres 10 sols d'un autre acte 10 francs pour deux procËs-verbaux du juge de paix d'Aubenas, 7 francs 7 sols pour le «solvit» de l'huissier. Ils se feront mÍme un malin plaisir de signer sa quittance. FranÁois aurait-il tout perdu dans l'affaire ? Qu'advenait-t-il des 3000 livres dÈposces dans la caisse des Biens Nationaux, versÈes bien sñr en assignats ? (un bordereau de crÈance Èmanant de Privas vol 3 art. 72 dÈclare que ces 3000 livres ont ÈtÈ rendues ý FranÁois, au capital venait s'ajouter 200 livres d'intÈrÍts dont FranÁois dut s'acquitter). Le 5 Brumaire, il semble que les parties aient convenu de s'entendre enfin devant MaÓtre Teyssier d'Aubenas. Pour mettre fin ý «toutes leurs contestations» Cachon et Chalvet d'une part, d'autre part FranÁois PastrÈ qui reprÈsente aussi son beau-frËre, s'entendent «mutuellement» pour fixer et liquider ce qui reste dñ. «le parfait et entier paiement du prix» s'ÈlËve ý 2929 francs en numÈraire mÈtallique cela va de soi. FranÁois promet de s'acquitter le 3 thermidor prochain, en supportant Èvidemment l'intÈrÍt couru. EspÈrons que la campagne agricole de cette annÈe 1800 fut bonne.
Sans doute pas puisque ce n'est que le 30 ventÙse soit 15 mois aprËs la conciliation qu'une quittance rÈvËle que FranÁois et son beau-frËre se sont enfin acquittÈs ! Devant MaÓtre Baratier «notaire public patentÈ» ý Aubenas, comparaissent ý nouveau les antagonistes de ce qui est devenue l'affaire Cachon-Chalvet-PastrÈ. Les deux nÈgociants ont enfin satisfaction puisqu'ils vont recevoir en numÈraire mÈtallique (les assignats et les mandats territoriaux avaient vÈcu, victimes de l'inflation) 3100 francs et ce, ý leur «contentement>~. Pensez les 2929 francs se sont accompagnÈs de 163 francs et 60 centimes pour les intÈrÍts «lÈgitimement» courus et de 7 francs et 40 centimes pour les frais d'inscription au Bureau de la Conservation des HypothËques. Nul doute que nos deux compËres de Saint-Germain durent tempÍter et contre la RÈpublique et contre la justice en arpentant la CÙte de Ville aux Chazes, lourds de c¦ur et lÈgers de bourse, dÈlestÈs qu'ils Ètaient !
L'apogÈe de la famille Èlargie:
Si FranÁois avait essuyÈ une dÈconvenue lors de l'Affaire Cachon Chalvet, il ne s'en tint pas pour autant pour battu dans sa soif de considÈration et d'ascension sociale, il va rÈcidiver dans l'acquisition de Biens Nationaux. En effet c'est lui qui se charge de collecter la quotepart de ses associÈs dans l'achat du Domaine de Ville qui appartenait au «ci-devant» marquis de VoguÈ sur la route de l'exil. Le 15 ventÙse, an 3, Fran,cois verse entre les mains de Jean-Louis Boyer adjudicataire du domaine 17 600 livres. Les acheteurs se sont groupÈs pour prÈtendre ý l'achat de la terre du Seigneur ÈmigrÈ. A cÙtÈ de FranÁois, nous relevons Dumas de Saint-Privat, La Roze de Balazuc, Ganivet de VoguÈ, Landraux de Saint-Privat, Bolze de La Palle d'Auzon (Saint-Germain dÈbaptisÈ), Constant de Lavilledieu, Mamarot de Saint-Privat lui aussi, Chambon de Lussas, Bonnefois de VoguÈ, Boyssier d'Aubenas, Jauffre de VoguÈ ainsi que Debanne. La part payÈe par chacun s'ÈlËve ý 1200 livres. Belle revanche pour Fran,cois que celle de saisir une part de terre du haut seigneur et de la noble famille ý laquelle ses ancÍtres et lui-mÍme versaient depuis la nuit des temps Ècus et rentes quand il ne fallait pas se rendre au ch’teau pour y porter la volaille !
La RÈvolution a certe touchÈ Saint-Germain, mais dans la vie courante, on ne peut avancer qu'il y ait eu de grands bouleversements. En 1790 AndrÈ SÈnÈque en est le maire, Monsieur Bonnaud le curÈ depuis 1754: il sera remplacÈ par un prÍtre assermentÈ Boyer auquel les paroissiens feront mauvais accueil au point de bouder l'office dominical. Nous relevons le 15 janvier 1792 que la RÈvolution n'avait pas que des adeptes dans la rÈgion, la proximitÈ de JalËs et les remous de la contre-rÈvolution ne pouvaient que refroidir les ardeurs patriotiques. A Saint-Germain, seuls se sont fait inscrire pour leur patriotisme et l'observance des lois constitutionnelles, AndrÈ SÈnËque le maire, Raoulx l'ancien reprÈsentant de la CommunautÈ ý Villeneuve de Berg lors de l'Èlection des dÈputÈs aux Etats GÈnÈraux, Bolze, AndrÈ Chaze bien sñr le secrÈtaire et maÓtre d'Ècole du village, Boyer le curÈ «jureur». 1793, c'est la tempÍte de la dÈchristianisation: le reprÈsentant en mission pour le Gard, la LozËre et l'ArdËche, Ch’teauneuf-deRandon fait dÈbaptiser les communes ardÈchoises. Quand on sait l'attachement des Vivarois aux Saint-Martin, Julien, AndrÈ, Maurice, il eut fort ý faire. Ainsi Saint-Germain devient la Palle d'Auzon du nom du quartier et justement celui o˜ FranÁois avait des terres. Rien apparemment ne nous laisse penser que FranÁois ait portÈ quelque intÈrÍt ý ces ÈvËnements qui pourtant le servaient.
Nous avions entrevu la personnalitÈ d'AndrÈ Chaze ý travers les comptes qu'il tenait pour FranÁois et pour bien d'autres sans doute. Il est originaire des Chazes, aprËs avoir fait ses Ètudes au CollËge d'Aubenas, il sera pendant 25 ans le maÓtre d'Ècole des enfants de Saint -Germain et pendant 17 ans le secrÈtaire du Conseil. Jusqu'en 1793 son traitement Ètait assurÈ par les familles des enfants qui frÈquentaient l'Ècole au tarif d'une livre pour la lecture, une livre pour l'Ècriture, autant pour le calcul et ce par mois (il arrivait que les parents ne s'acquittaient pas assez promptement, le maÓtre n'hÈsitait nullement ý rÈclamer haut et fort son dñ). En 1793, l'assemblÈe communale sous la prÈsidence de l'Agent national Raoulx et du maire Bolze lui alloue une solde de 500 livres (au frais de la RÈpublique !)
Il semble que la compÈtition municipale n'ait pas eu les faveurs de FranÁois, songeait-il ý plus ou s'est-il contentÈ de satisfaire sa boulimie de terres et d'assouvir sa soif de considÈration ? Certair~ement, il voulait devenir et Ítre reconnu pour un notable. La liste des jurÈs du district du Coiron arrÍtÈe le 2 ventÙse an 2, outre qu'elle nous permet d'apprÈhender les limites du District qui correspondent exactement ý celles de l'arrondissement actuel de Privas, fait apparaÓtre le nom de FranÁois PastrÈ, notable ! Il a atteint par cette nomination le plus haut degrÈ de considÈration auquel il peut prÈtendre, le voici rangÈ aux cÙtÈ des notabilitÈs. Et paradoxalement lui qui ne quÈmandait ni honneurs municipaux, ni certificats de civisme, apparaÓt ý cÙtÈ de patriotes convaincus tels Duclaux d'Aubenas, Fuzier de la Voulte. Cachon et Chalvet n'y figurent pas et pour cause, ils Ètaient ý JalËs.
Pour la dÈfense du territoire envahi par l'Europe coalisÈe, SaintGermain doit fournir 17 soldats de 18 ý 25 ans et 10 de 25 ý 35 ans ý la conscription: toutes les forces vives du village. FranÁois Èvitera l'impopulaire conscription ý son fils en lui achetant un remplaÁant pour la somme de 1000 livres et dont 500 comptant, le solde lorsque le conscrit aura envoyÈ son certificat de prÈsence au corps (prudence oblige, les dÈsertions sont monnaie courante). La Commune est ainsi mise ý contribution pour l'Èquipement de la troupe, son ravitaillement est prÈlevÈ chez l'habitant soit 80 setiers de blÈ, 75 livres d'huile de noix. Si FranÁois a pu Èviter ý son fils la mobilisation, il n'en sera pas moins imposÈ pour contribuer ý l'effort de guerre par le biais des emprunts forcÈs: en qualitÈ de percepteur de sa commune il remet entre les mains de Gamon, receveur des contributions Publiques les 3 775 livres qui constituent la contribution de la Commune pour l'an 4.
Figure haute en couleur que ce FranÁois, actif s'il en est, sourcilleux ý plaisir, jaloux de son pouvoir de chef de famille, fier jusqu'ý l'orgucil de la considÈration que lui donnent ses terres, ses multiples activitÈs qui font de lui, le notable reconnu de sa paroisse. Si nous devions l'imaginer, nous pencherions volontiers pour l'idÈe que c'Ètait une force de la nature, ý la robuste santÈ: et bien non ! il est de taille trËs moyenne, les yeux marrons, porte la barbe et de plus il est d'une frÍle santÈ. Jugeons plutÙt: en 1786, il a quarante quatre ans et a recours au mÈdecin de Villeneuve de Berg et ý l'apothicaire du lieu. L'ordonnance qui lui est remise aprËs consultation le 11 avril peut nous Èclairer sur sa maladie.
Le malade qu'il est, doit prendre ý son retour aux Chazes «la moitiÈ d'une portion qu'on faira pour deux prises». SinguliËre mÈdecine si l'on en juge par sa composition «trois once de fleurs d'orange, trente gouttes minÈrales d'Hofman, autant de teinture de Castor et vingt gouttes anodines de sydherman mÈlÈes exactement dans une phiole». Cela tient plus du grimoire de sorcellerie que de l'officine. Deux heures aprËs le patient prend un bouillon, puis bien sñr la seconde prise de la potion. Si d'aventure notre homme souffrait encore de la tÍte, on aurait recours ý la sacro-sainte saignÈe. Il ne manque ý la panoplie que la purge. Nos connaissances en mÈdecine sont limitÈes, mais il nous semble que FranÁois souffrait de violentes cÈphalÈes accompagnÈes de sueur; angine doublÈe d'une forte sinusite sans doute.
Pour le lendemain, il est prescrit une «autre mÈdecine» ainsi formulÈe «prenes de la m¦lle de casse et des thamarins de chagnun six drachmes, du senne d'hespagne trois dragmes, de la rhabarbe concassÈe deux scrapules de fleurs de pÈchers et danis chaquan une pincÈe.» Le tout est mis dans un paquet que l'on met ý bouillir dans un pot «d'un gobelet et demi d'eau» on y ajoute «deux onces de manne»; la manne fondue, on exprime le paquet dont le bouillon sera ingurgitÈ «pour une seule prise», puis trois heures aprËs, ce sera l'inÈvitable bouillon de deux heures en deux heures. Si aprËs cela la fiËvre persiste, on aura ý nouveau recours au mÈdecin.
Ce que l'on ne manque de faire... Ie lendemain ! Le mÈdecin Pinchenier renouvelle sa thÈrapeutique en y apportant quelques modifications: il s'agit d'un traitement de choc. Outre le sennÈ et autres «thamarinds», il prescrit «deux prises de sang de bouoquetin» «Antimoine diaptroretique, syrop de lierre terrestre, deux drames de pavot blanc». Le porteur, son fils ou le valet, s'acquitte pour cette penacÈe de 7 livres, 4 sols. Il ne faisait pas bon Ítre malade. L'administration de ces mÈdicaments dut avoir un effet immÈdiat ou assez efficace puisque voilý notre homme bientÙt sur pied.
Le 1er juin 1787, FranÁois rechute. Le mÈdecin Pinchenier est ý nouveau consultÈ, il Ètablit une ordonnance ainsi rÈdigÈe : « Une portion faitte avec huille d'amande douce, sirop de limon et eau de fleurs dorange de chaquan une once, trois ceuillerÈes eau de lis» un sÈdatif qui doit calmer les tremblements du patient. Ensuite le clystËre composÈ de «m¦lle de casse, des thamarins» et du sennÈ «d'orient», on y adjoint «trois onces de manne» pour faciliter l'absorption. Le bouillon vient complÈter le traitement. Si la potion a une composition qui tient pour nous du mystËre ou du secret des herboristes, son effet n'en est pas moins miraculeux sur notre homme qui traite dans la semaine qui suit affaires sur affaires. Que diable les «magnans» n'attendent pas ! S'il y eut rechute nous n'en savons rien, ý moins que sa fragilitÈ n'ait ÈtÈ qu'apparente puisque c'est en 1814 qu'il s'Èteindra ý l'’ge respectable pour l'Èpoque de pas moins de 72 ans. La longÈvitÈ n'est pas un vain mot chez les PastrÈ ! Nous avons pu voir au long des affaires prÈcÈdentes que sa fragile constitution ne l'a pas empÍchÈ de dÈployer une activitÈ dÈbordante, une hargne voire de l'’pretÈ ý traiter son monde, et ses affaires, qu'elles soient heureuses ou malheureuses !
Il a atteint ý l'aube de l'Empire le sommet de sa condition, il est reconnu notable. Sans l'avoir demandÈ, n'avoir le moins du monde postulÈ les charges municipales, il est nommÈ outre sa charge de jurÈ, adjoint municipal de sa commune le 9 thermidor an 8: cette nomination est arrÍtÈe par le prÈfet de l'ArdËche, cÈlÈbre s'il en est, Charles Cafarelli. FranÁois suscite des jalousies dans le pays comme l'attestent des procÈs mineurs avec ses voisins. Tel Monjal qui veut lui faire boucher une ouverture qui donne sur sa cour, tel SenËque qui se voit refuser un droit de passage dans la cour de FranÁois. Les rues du hameau sont si Ètroites que le seul passage praticable pour les charrettes, est justement la cour de notre homme. SÈnËque se verra rÈpliquer un refus magistral: l'arriËre de la cour sera obturÈ par un mur qui subsiste encore, de mÍme que les rancoeurs.
Il Ècrase sans conteste possible, de sa supÈrioritÈ de gros propriÈtaire foncier, ses concitoyens. Le gros de la propriÈtÈ tels Bourdaric, les Faysses, se trouve ý proximitÈ du hameau des Chazes pas moins de 14 hectares 16 ares de terres labourables, 23 hectares de devois (landes de chÍnes blancs, cades ou bnis), vignes, prÈs, bois, vergers de noyers et mñriers. A cela s'ajoutent les 9 hectares 17 ares du domaine de la Prade achetÈ ý Alexis Helly et composÈ de terres de blÈ, prÈs, vignes, claux. Plus les prÈs du Pont, de la Palle d'Auzon soit 1 ha 20 ares. Les immeubles sont comparables aux domaines fonciers. Une maison de maÓtre avec chazal, hangar, Ètables, Ècurie, cave, dÈpendances, deux puits au hameau des Chazes, plus la partie occidentale du couvent des BÈnÈdictines de Lavilledieu, le moulin du Pont et ses meules, une autre maison et ses dÈpendances ý Baissac et enfin la derniËre acquisition, une part du domaine de Ville dans la commune d'Aubenas soit 1 hectare 10 ares. Un cheptel de 130-moutons, 4 b¦ufs, une jument et un mulet.
Sa maisonnÈe n'en est pas moins impressionnante, outre sa femme Elisabeth Joffre, il a huit enfants. Marie, marice ý son cousin germain Antoine Roume, Elisabeth mariÈe ý Etienne Lacoste de Saint-Sernin, Catherine mariÈe aux Chazes avec AndrÈ Chazes dit SenËque un lointain cousin, Marie-Anne mariÈe ý Louis Martin de Villeneuve de Berg, Etienne mariÈ ý Saint-Martin des OlliËres de la commune de Saint-Didier-sous-Aubenas, Jeanne mariÈe ý Pierre Ozil de SaintMaurice d'Ibie et Antoine ý Madeleine Villedieu de Mirabel. Mais cette nombreuse progÈniture ne constitue-t-elle pas un danger pour le domaine patiemment et ’prement rassemblÈ par le pËre ? FranÁois emploie aussi une servante, un valet, un berger Louis Rigaud originaire de Lavilledieu et un goujat.
La notoriÈtÈ de FranÁois est indubitable, il trouve ý son fils FranÁois un parti digne de lui. Le 26 juin 1806 est signÈ par devant MaÓtre Aspic notaire ý Aubenas, le contrat de mariage de FranÁois PastrÈ fils et de Marie Ponson des Chaussades commune d'Aubenas. C'est un beau mariage. FranÁois pËre donne son consentement au mariage (le fils a trente quantre ans !). Les jeunes gens se marient sous le rÈgime dotal et promettent de se conformer aux lois de l'Etat pour la cÈlÈbration. FranÁois fait donation ý son fils du «quart de ses biens prÈsents et ý venir» et il y adjoint la somme de 3000 francs ! Ponson pËre constitue en dot sa fille Marie pour la somme de 8 0~)0 francs, la moitiÈ est acquittÈe et emboursÈe sur l'heure par PastrÈ pËre ! les 4000 francs restant dus seront versÈs ý l'ÈchÈance de «ce jourd'hui» en quatre paiements et pour le cas o˜ les rËglements tarderaient, l'intÈrÍt couru sera de 5 % !
Mariage de raison plutÙt que d'amour ! Les comptes ne s'embarras sent pas d'attendrissement ni de laisser-aller. On peut s'arrÍter un instant sur la donation de FranÁois ý son fils. Il lui remet le quart de ses biens alors que FranÁois a sept frËres et s¦urs. Seraient-ils soumis ý la portion congrue et un droit d'aÓnesse serait-il venu s'immiscer dans la tradition quasi-Ègalitaire du Bas-Vivarais ? Certainement puisqu'au dÈcËs de leur pËre et beau-pËre, frËres, s¦urs, beaux-frËres et belles s¦urs se retourneront contre FranÁois et iront jusqu'ý lui faire interdire de lever la rÈcolte, les fruits et la vendange de la campagne 1813 pour procÈder ý un partage plus Èquitable du domaine parternel !
La fin approche pour FranÁois le 3 messidor 1811 il a 70 ans, et c'est un homme usÈ qui se rend en consultation ý Villeneuve de Berg. BientÙt la famille fait appel ý nouveau au docteur qui se rend ý son chevet pour y constater que «I'odeur qui s'en exhale tire sur la putrÈfaction». Son «poulx» quoique plein «est fraquent plus que dans le naturel». Le docteur lui fait ouvrit la bouche pour constater que les incisives et les canines «de lune et l'autre machoire» prÈsentent des «gonflements» des gencives avec «engorgement» d'un rouge vif, les glandes «maxilaires» surtout du cÙtÈ droit sont enflammoes. GangrËne d'une part, scorbut, avitaminose d'autre part, diagnostiquerons-nous !
Il s'Èteint au beau mois de germinal 1814 (le 24/04/1814) Acte de dÈcËs - mairie de Saint-Germain), non sans avoir jetÈ un regard de fiertÈ et de regret sur la moisson qu'il ne lËvera pas et que s'entredÈchireront ses enfants. Il avait des qualitÈs et beaucoup de dÈfauts, il Ètait l'homme de sa terre, fortement enracinÈ dans la glËbe de ses anciens enfin devenue sienne, dur comme elle, avare comme elle: il Ètait enfin, et de toutes ses fibres, Vivarois !
    Profession : mÈnager
    PrÈnom : FranÁois
          Nom de famille : PASTRE
    Information de famille :
          avec JOFFRE Elisabeth :
                Mariage :
                      Date : avant 1768 (26 ans)
                enfants :
                   PASTRE Marie (1768 )
                   PASTRE Elisabeth (1770 )
                   PASTRE FranÁois (1772 )
                   PASTRE Catherine (?)
                   PASTRE Marie Anne (?)
                   PASTRE Etienne (?)
                   PASTRE Antoine (?)
                   PASTRE Jeanne (?)

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